mercredi 28 juillet 2010

P. 261. Le 18 juillet au Camp des Milles

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Camp des Milles (BCFYV/DR).

Discours de Robert Mizrahi :
"Si l'Homme continue à être un Loup pour l'Homme,
notre planète sera un Paradis perdu"...

Robert Mizrahi :

- "Permettez-moi de rappeler que François Mitterrand a décrété cette cérémonie en Janvier 1993 pour commémorer la grande rafle du Vélodrome d'Hiver du 16 Juillet 1942 à Paris, au cours de laquelle 13152 Juifs dont 4115 enfants de 1 mois à 15 ans furent arrêtes, parqués et déportés pour être anéantis à Auschwitz. Un film récent a retracé ce drame.

Rappeler aussi que lors de la cérémonie du 16 Juillet 1995, Jacques Chirac a reconnu la responsabilité de la France dans l'extermination des Juifs vivant sur son sol, durant cette période noire de 1940 à 1945.

Depuis juillet 1993, j'assiste à cette cérémonie à Marseille, ma ville natale, où mes parents furent arrêtés en 1944, par la Gestapo française, et exterminés dans les Camps de la Mort, Marseille où mon jeune frère et moi-même avons été sauvés par des Justes.
Justes comme la famille Vigué à laquelle, en votre présence et sous votre autorité, Madame le Maire, le Consul d'Israël Schmuel Sivan et moi-même, avons remis le 10 Juin dernier," la Médaille des Justes parmi les Nations" de l'Etat d'Israël.

Aujourd'hui je suis venu ici en tant que Président d'Honneur du Crif Marseille-Provence, pour intervenir, à sa demande, en lieu et place de sa nouvelle Présidente Michèle Teboul, mais aussi, je dois le dire, en tant qu'ami d'Alain et Sidney Chouraqui qui va recevoir tout à l'heure les insignes dans l'Ordre National de la Légion d'Honneur.

Dans la nuit du 1er au 2 septembre 1943, à quelques pas, si je peux dire, de cette belle ville d'Aix en Provence, 2500 Juifs: hommes, femmes, enfants, vieillards, ont quitté ce lieu dans des wagons plombés, pour être exterminés dans les Camps de la Mort de Pologne."


Wagon du Camp des Milles (BCFYV/DR).

- "Alors comment oublier ces phrases écrites par le Pasteur Manen, "Juste parmi les Nations", la Mémoire de ce Camp, qui s'efforça de sauver certains d'entre eux malgré les risques encourus.
Je cite :
« Ce qui était particulièrement douloureux à voir, c'était le spectacle des petits enfants, car des ordres stricts furent donnés en dernière heure tels qu'au dessus de 2 ans tous devaient obligatoirement partir avec leurs parents…
Des enfants tout petits, trébuchant de fatigue dans la nuit et dans le froid, pleurant de faim, s'accrochant lamentablement à leurs parents pour se faire porter…. de pauvres petits bonhommes de 5 ou 6 ans essayant de porter vaillamment un baluchon à leur taille… puis tombant de sommeil et roulant par terre eux et leurs paquets… tout grelottant sous la rosée de nuit... »

J'arrête là cette citation qui comprend encore une dizaine de lignes, précisant que le train est parti, nous savons où, hélas, et avec ce cri de douleur du Pasteur Manen : " C'est à moi que vous l'avez fait ".

Comment ne pas être saisi d'une intense émotion en écoutant ces quelques lignes écrites dans son journal par cet homme au grand cœur ?
Et pourtant ! Voilà que pour certains, 6 millions de Juifs exterminés, 66 ans après, cela ne leur paraît pas suffisant !
L'antisionisme habit neuf de l'antisémitisme, répand à nouveau la haine.
Et dans des défilés, depuis quelques années, on crie " Mort aux Juifs " sans que cela émeuve le moins du monde ceux qui défilent y compris certains élus qui viennent chercher là un électorat.
La propagande nazie a été récupérée et amplement développée par les moyens de communication actuels : télévision, internet, mobiles.
Et le flot incessant d'informations ne laisse pas, à une grande majorité, le temps de l'analyse.

Aussi, sur ces lieux où s'édifie un Mémorial, grâce à la pugnacité de son président, Alain Chouraqui et de tous les membres de son conseil, avec le soutien des collectivités locales et de l'Etat, les deux mots ajoutés à "Mémorial du Camp des Milles" ces deux mots " Mémoire et Education" me paraissent absolument indispensables.
"Mémoire" certes mais surtout "Education", afin que les jeunes générations comprennent que :
"si l'Homme continue à être un Loup pour l'Homme, notre planète sera un Paradis perdu".

Je vous remercie."

Robert Mizrahi,
Président d'Honneur du Crif Marseille–Provence,
Le Wagon souvenir- Les Milles.
Dimanche 18 Juillet 2010.

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lundi 26 juillet 2010

P. 260. Pierre et Louise Rey, Justes parmi les Nations

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Le public en la Mairie de Nègrepelisse. A dr. : Jacqueline Gourevitch, enfant cachée (Ph. C. Gordon/BCFYV/DR).

Cérémonie à Nègrepelisse
pour deux fermiers de Lavergne
ayant sauvé la petite Jacqueline Gourevitch

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Pierre Alfred et Louise Marie Rey étaient fermiers à Lavergne, lieu situé à quatre km de Nègrepelisse. De juin 1942 au printemps 1945, ils prirent sous leur chaleureuse protection la petite Jacqueline Gourevitch. Celle-ci n’avait pas plus de trois ans quand elle fut ainsi mise à l’abri de la Shoah grâce aux Rey.

Pierre Alfred et Louise Marie se réclamaient tous deux de la religion protestante. Leur famille comptait non moins de quatre enfants en 1942 :
- Alice, 21 ans,
- Arlette, 20 ans,
- Denis, 16 ans et
- Maurice, 8 ans.

Leur généreuse hospitalité, malgré les dangers multipliés par l’occupant et ses collaborateurs, les Rey l’offrirent d’abord à un neveu ayant eu le courage de s’évader d’Allemagne. Puis Jacqueline, juive persécutée, arriva à Lavergne. Aussitôt intégrée et entourée. Alice, en aînée responsable, veille à son éducation et lui apprend à lire ainsi qu’à écrire.

La région n’est pas de tout repos. Les Allemands fouillent la ferme à deux reprises. Les Rey font passer Jacqueline pour une petite cousine venue respirer le bon air des campagnes…

Au printemps 1945, les horreurs de la guerre s’éloignent et les parents de Jacqueline viennent à Lavergne pour retrouver leur enfant. Celle-ci appelait alors son sauveur : « Papa Alfred » et l’épouse de ce dernier : « Maman Louise »…"

Les époux Rey, Justes parmi les Nations (BCFYV/DR).

Compte-rendu de la cérémonie par Albert Seifer, Délégué du Comité français pour Yad Vashem :

- "L’après-midi du 4 juillet à 15h30, nous nous retrouvions dans la mairie de Nègrepelisse pleine à craquer, pour assister à la cérémonie honorant à titre posthume Pierre Alfred et Louise Marie Rey qui cachèrent dans leur ferme de Lavergne la petite Jacqueline Gourevitch ( future Mme Lerfel ) alors âgée de 3 ans, de 1942 à 1945.
Le couple Rey, des protestants simples et généreux, avait 4 enfants : Alice 21 ans, Arlette 20 ans, Denis 16 ans et Maurice 8 ans.

Dans son discours d’accueil Mr Maurice Correcher, maire-adjoint rappela avec beaucoup d’émotion, comment sa tante Joséphine Correcher, épouse Costa cacha dans une huche à pain une fillette du Moulin de Moissac lors d’une perquisition des Allemands, et lui sauva ainsi la vie.

Puis le Dr Albert Seifer délégué régional du comité français pour Yad Vashem exposa à l’assistance ce qu’est Yad Vashem et rappela la fameuse lettre de Mgr Jules-Géraud Saliège archevêque de Toulouse sur la personne humaine qui fut lue dans toutes les églises du diocèse les dimanches 23 et 30 Août 1942.

Albert Seifer souligna l’action courageuse de Marie-Rose Geneste, au service de Mgr Théas archevêque de Montauban, laquelle parcourait 100 km par jour sur sa bicyclette bleue, exposée à Yad Vashem, pour distribuer dans toutes les églises du diocèse la lettre de Mgr Théas proche de celle de Mgr Saliège :
« Marie-Rose Geneste, Juste parmi les Nations, est très âgée et malade. J’ai eu l’honneur de la féliciter en décembre 1991 lors du « Colloque sur les camps d’internement dans le Sud-Ouest de la France » organisé à Montauban par le Recteur Philippe Joutard. »

Mr le sénateur Collin fit un très beau discours mettant l’accent sur le courage et l’humanisme de la famille Rey.

Mr Fabien Sudry, Préfet du Tarn-et-Garonne lui succéda dont le discours fut également de très bonne qualité qui rendit hommage à la valeureuse famille Rey.

Après les remerciements émus de Maurice Rey, fils des récipiendaires, Mme Jacqueline Gourevitch-Lerfel exprima sa profonde reconnaissance envers cette famille méritante."

Jacqueline Gourevitch, enfant cachée chez les Rey et prononçant son discours de remerciements lors de la cérémonie de Nègrepelisse (Mont. BCFYV/DR).

Jacqueline Gourevitch :

- "Quelle belle récompense justement méritée par cette famille qui m'a recueillie durant trois ans.
Durant cette période noire, où nous avons eu la visite de la Gestapo, j'étais choyée et je n'ai que des bons souvenirs à la ferme de Lavergne. Je me sentais en sécurité et je les appelais papa Alfred et maman Louise.
Un grand merci à tous sans oublier Denise et Arlette.
J'ai souhaité que leur nom soit inscrit sur le Mémorial Yad Vashem en Israël car leur courage restera à jamais gravé dans ma mémoire."

Fabien Sudry, Préfet du Tarn-et-Garonne :

- "Il est important d'entretenir le devoir de mémoire…
La famille Rey a fait preuve d'un grand sens des valeurs, de solidarité et de partage. Cet acte d'humanisme doit être un modèle. Il est important que les jeunes générations participent à de telles cérémonies pour retransmettre ces moments de notre histoire."

NOTE :

Notre gratitude à Albert Seifer, Délégué régional, pour ses apports à la rédaction de cette page.

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P. 259. Jean Joseph Moussaron, Juste parmi les Nations

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Mgr Moussaron (BCFYV/DR).

Cérémonie de reconnaissance
de l'Archevêque d’Albi, Castres et Lavaur
sous l'occupation

Compte-rendu d'Albert Seifer, Délégué du Comité Français pour Yad Vashem :

- "Dimanche 4 Juillet 2010 à 11h , dans la salle des Etats Albigeois de l’Hôtel de Ville eut lieu la cérémonie de remise de la médaille des Justes, à titre posthume, en présence de Philippe Bonnecarrère, maire d’Albi, de Shmuel Sivan Consul d’Israël à Marseille et du Dr Albert Seifer, délégué régional du Comité français pour Yad Vashem. En l’absence de membre de la famille de Mgr Moussaron, l’honneur échut à Mgr Carré, archevêque d’Albi, de recevoir la médaille des Justes et le diplôme d’honneur décernés à son courageux prédécesseur.

Comme à son habitude, Mr Bonnecarrère fit un très beau discours, sans aucune note, rappelant le contexte dangereux de cette époque sombre de notre histoire.

Puis le Dr Albert Seifer exposa à l’assistance ce qu’est Yad Vashem, rappela les rafles du Vél d’Hiv des 16 et 17 juillet 1942, celles « de la zone libre » du 26 Août 1942 et raconta comment il fut caché et sauvé ainsi que 82 enfants juifs dans le couvent de N.D de Massip à Capdenac grâce à Mgr Jules-Géraud Saliège, archevêque de Toulouse, Compagnon de la Libération et futur cardinal, et à son réseau.

Shmuel Sivan, consul d’Israël à Marseille exposa le rôle salvateur des Justes en France qui contribua à épargner la vie des ¾ des juifs de France. Le Dr Albert Seifer rappela de quelle façon grâce à l’intervention de sœur Marie Suzanne (Simone Bondurand, Juste parmi les nations) Mgr Moussaron plaça chaque membre de la famille Zenatti dans quatre couvents différents (trois dans le Tarn et le quatrième à Perpignan).

Puis ce fut la remise de la médaille des Justes et le diplôme d’honneur de Mgr Moussaron, à titre posthume, mais dont le portrait était bien présent sur l’estrade et reflétait la bonté, à son successeur actuel Mgr Carré dont le prochain ministère se situera à Montpellier.

Mme Dreyfus née Haas (une famille très honorable d’Albi) témoigna avec émotion et raconta comment elle fut reçue régulièrement à la table de Mgr Moussaron le dimanche, alors qu’elle était interne au collège de Réalmont."

Père Mathieu :

- "Trois raisons ont été majeures pour l’obtention de cette médaille : en 1er, à la suite du Cardinal Saliège et de Mgr Théas, la protestation face à l’arrestation et à la déportation des Juifs qui étaient faites au mépris de tout respect de l’humain, souvent en séparant les familles. En second, son action pour que les écoles qui avaient un internat, les collèges et les lycées catholiques, les couvents et les monastères accueillent les juifs (16 lieux). Troisièmement, son arrestation par la Gestapo en 1944 et son internement à la Prison Saint-Michel de Toulouse."
(Eglise catholique dans le Tarn).

Instantané de la Cérémonie.
De g. à dr. : P. Mathieu; Shmuel Sivan Consul d’Israël à Marseille; Mgr Carré, archevêque d’Albi; Albert Seifer, Délégué du Comité Français pour Yad Vashem (Ph. C. Gordon/BCFYV/DR).

Charles Le Bourgeois :

- "C'est une justice à lui rendre que de lui remettre cette médaille, même si les récompenses sur terre ne sont pas équivalentes à celles du ciel », commente Claude Zenatti, un ancien réfugié qui explique « avoir été protégé » pendant la guerre par Mgr Moussaron. Lequel était considéré comme partisan du maréchal Pétain, du fait du respect qu’il avait du pouvoir en place. Mais sans jamais collaborer."
(La Croix, 1 juillet 2010).

Lettre de Jean Joseph, Archevêque d’Albi, Castres et Lavaur :

- "Des circonstances indépendantes de notre volonté ne nous ont pas permis de vous dire plus tôt la peine que nous ont causées les mesures de déportation prises récemment contre les Israélites réfugiés en France.
Si dans notre département elles ont été appliquées avec autant de correction et délicatesse qu’il est possible d’en mettre en pareil cas, sur bien des points du territoire on a vu se dérouler des scènes très douloureuses. Des femmes ont été séparées de leurs maris, des enfants de leurs parents. La religion et l’humanité ne peuvent que protester contre cette violation des droits sacrés de la personne humaine et de la famille et cette méconnaissance de la loi divine de la charité.
Et que personne ne voit dans notre parole une atteinte portée au loyalisme que nous devons au Gouvernement et que nous n’avons cessé de recommander. Le Gouvernement n‘est pas en cause. Loin d’avoir pris l’initiative de ces mesures aussi contraires à la tradition française qu’à l’esprit chrétien, il les a subies comme une conséquence de la défaite. Au surplus, c’est servir son œuvre de redressement que d’affirmer, à l’heure où des catholiques même risqueraient de les oublier, les principes qui sont inscrits dans l’Évangile, que l’Église a toujours défendus et sans lesquels il n‘est pas de vraie civilisation. Prions Dieu, nos très chers frères, d’accorder bientôt à la France et au monde des jours meilleurs où les hommes, quels que soient leur race et leur pays, sauront se reconnaître et se traiter comme des frères.
(20 septembre 1942).

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jeudi 22 juillet 2010

P. 258. Louis et Jeanne Felten, Justes parmi les Nations

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Une du quotidien "Le Pays" (DR).

Cérémonie de reconnaissance
à Chagey

Le 8 juillet, la Médaille et le Diplôme de Justes parmi les Nations ont été remis à titre posthume à Louis et à Jeanne Felten. Leur fille, Jeannine Sainsimon-Felten les a reçus des mains de Gilbert Roos, Consul d'Israël à Strasbourg. A l'invitation du Maire, Josette Loch ainsi que du Délégué du Comité Français pour Yad Vashem, Didier Cerf, cette cérémonie eut pour cadre la salle Georges Brassens à Chagey.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Dès leur naissance, les destins d’Yvan Rueff et de Louis Felten vont se lier. Tous deux naissent à Guebwiller (Haut-Rhin). Le premier appartient à une communauté juive de vieille implantation, il est né en 1906. Le second vit le jour en 1913.

Avec la crise des années 30, le travail devient rare. Louis et Jeanne, son épouse originaire de Soultz, quittent le Haut-Rhin pour le Doubs. Les forges d’Audincourt engagent encore. Louis y trouve un emploi et le couple s’installe à Héricourt.

Motivé par leur exemple, Yvan Rueff propose à son épouse, Maria, une jeune catholique de Wasserbourg, de suivre le même itinéraire. Tous deux sont engagés chez Peugeot et habitent désormais à Héricourt.

La famille Felten s’agrandit en 1937 avec la naissance de Jeannine qui sera suivie de Raymond en 1940 (avec pour marraine Maria Rueff) et de Daniel en 1942.

Le père de famille décide de changer du tout au tout son orientation professionnelle et d’entrer dans la police. Après l’école de Plombières-les-Dijon, Louis est d’abord attaché au commissariat d’Audincourt puis à celui d’Héricourt.
Les Felten aménagent donc dans cette commune de la Haute-Saône en 1943.

Alors que sévit la persécution des juifs, et pour en préserver Yvan Rueff, le couple Felten lui offre de l’abriter. Pour les voisins et les curieux éventuels, voire les personnes malveillantes, Yvan sera présenté comme étant un cousin. S’il est ainsi sauvé, son épouse Maria est mise derrière les barbelés de Drancy. Heureusement pour elle, elle prouve qu’elle n’est pas juive et même catholique. Les autorités occupantes la remettent en liberté…

En août 1944, Yvan Rueff sort de l’ombre. Il rejoint le maquis du Lomont.

Quant à Louis Felten dont la patriotisme est sans faille et qui avertit notamment des juifs d’arrestations programmées, il se trouve mis en état d’arrestation le 11 septembre 1944. Interné à Heilbronn, il retrouvera la liberté le 1er mai 1945."

Louis Felten, policier à Héricourt (Photo prise en 1955/Le Pays/DR).

- "Ses mérites seront reconnus qui lui vaudront la Croix de guerre, la Médaille militaire, la Croix du combattant volontaire de la résistance, la Médaille de la déportation et la Légion d'honneur. Il restera attaché au commissariat d’Héricourt jusqu’à sa retraite en 1968."

Claude Raymond :

- "Prenant tous les risques, Jeanne et Louis Felten avaient recueilli chez eux, à Héricourt, Yvan Ruell réfractaire au STO israélite, du 5 février au 28 août 1944. Ces huit mois ont sauvé la vie d'un homme traqué dont les parents belfortains ont été raflés par la police française du régime collaborationniste de Vichy pour être envoyés à Dachau.
(...) Louis Felten participe de façon active à divers coups de main, réception de parachutages, transports d'armes et de blessés, sabotages à l'explosif. Il fournit de faux papiers aux fugitifs. Mais surtout sa parfaite connaissance de la langue allemande lui permet de renseigner avec efficacité sur les activités de la Feldgendarmerie. Nombre de personnes échappent grâce à lui à une arrestation certaine."
(Le Pays).

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lundi 19 juillet 2010

P. 257. 18 juillet 2010

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Justes parmi les Nations : Mmes GASTELAIS et BEAUDIOT, les époux FUNE, le consul du Portugal MENDES DE SOUSA (Mont. BCFYV/DR).

Discours de Paul Schaffer
sur le site du Vel d'Hiv...


Paul Schaffer :

- " Nous commémorons en ce jour le 68ème anniversaire de la rafle du Vel’d’hiv.
Comme chaque année je me souviens de l’important discours, tenu ici même il y a 15 ans, par le Président Jacques Chirac. Ses propos m’avaient incité à lui écrire spontanément, pour exprimer ma reconnaissance, car j’attendais vainement, depuis 53 années, dans l’inquiétude et la déception, la mise au point qu’il venait d’énoncer.

En effet, arrêté par des Gendarmes à Revel, Haute Garonne, en zone occupée, le 26 août 1942, j’ai été déporté le 4 septembre par le convoi N°28, vers Auschwitz, avec ma mère et ma sœur ainée, âgée de 19 ans.
Ce convoi emportait 999 personnes. En 1945 vingt-sept seulement sont revenues : je suis l’un d’eux et l’unique survivant de ma famille.

Or si je prends la parole aujourd’hui devant vous, c’est justement pour que nous nous souvenions ensemble du drame peu connu et jusqu’ici jamais commémoré : la rafle massive des Juifs étrangers, du mois d’Août 1942, qui s’est déroulée en zone non-occupée et qui a atteint les Juifs dans les communes les plus reculées du territoire.
Décidée et exécutée par le gouvernement de Vichy, cette rafle avait pour objectif de livrer à la Gestapo les Juifs étrangers se trouvant sous sa responsabilité. Il s’agissait de compléter les 13.152 personnes arrêtées et regroupés au Vélodrome d’hiver et d’atteindre le nombre de 22 000 Juifs, exigé par l’occupant.
Consacrant définitivement le déshonneur du régime de Vichy.

Il me paraît inutile de rappeler ici que ces étrangers sont venus en France espérant y trouver secours et protection.
Ainsi 10.587 hommes, femmes, vieillards et enfants furent arrêtés, la plupart lors des rafles du 26 août et déportés via Drancy dans des conditions abominables, pour être presque tous assassinés dans les chambres à gaz des camps d’extermination. De ces 10.587 déportés, seuls 270 ont survécu.

Ainsi, aux horreurs des arrestations, dites du Vel d’Hiv, s’ajoutent celles du mois d’Août 1942. Les deux plus grandes rafles ont mené vers les camps d’extermination, en l’espace de ces deux mois, quelques 23 800 personnes, c’est presqu’un tiers des 76 000 Juifs déportés de France, durant toutes les années de l’occupation.

La haine des Juifs, amplifiée par la propagande nazie, avait trouvé un écho favorable auprès de certains Français qui se sont fait leurs complices, aboutissant à la Shoah.
Néanmoins et dans le même temps, d’autres Français, par simple humanité, avec bonté et abnégation ont sauvé, souvent au péril de leur vie, des Juifs de la déportation et de la mort.
Identifiés, ils ont reçu de l’Etat d’Israël le titre de Justes parmi les Nations.
Parmi ces Justes, reconnus ou restés anonymes - l’autre dimension de cette journée de souvenir - je souhaite rappeler plus particulièrement la mémoire de Mgr Saliège de Toulouse et de Mgr Théas de Montauban. Les arrestations du mois d’Août donnèrent lieu à la rédaction de leurs lettres pastorales : elles furent lues dans toutes les églises de leurs diocèses. Ils y dénonçaient ces actes qui portaient atteinte à la dignité humaine et ils appelaient les Chrétiens de France à ne pas être complices de pareils forfaits."

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Justes parmi les Nations : M. TOQUANT, Mme LANEURIE, Mme MARMAJOU, M. BROTTES (Mont. BCFYV/DR).

- "Nous le savons, les Justes de France furent de toutes obédiences et appartenaient à des milieux religieux, culturels et sociaux différents. Ils furent nombreux, même si la plupart resteront dans l’ombre, faute de ne pas avoir raconté à temps ou par modestie leur histoire.
Pourtant, je suis heureux, comme Président du Comité français pour Yad Vashem, de pouvoir instruire aujourd’hui encore, bien que tardives, des nouvelles demandes qui continuent de nous parvenir et que Yad Vashem Jérusalem décidera d’honorer du titre de Justes.
Mais le temps n’efface pas notre reconnaissance, leurs actions sont et resteront une leçon à tout jamais.
Ils ont sauvé l’honneur de la France !

Dans un monde où les actes de haine, la confusion des valeurs, la diabolisation d’Israël se manifestent, le rappel des principes qui ont guidé les Justes d’hier s’impose, et exige de nous de défendre la vérité, la justice et la paix.

Tout en le déplorant, il faut que j’évoque aussi aujourd’hui un acte qui s’est produit lors d’une récente remise de diplôme de Justes, dans une petite ville de la province française. Alors qu’un couple d’agriculteurs ayant caché des Juifs pendant la guerre était honoré, un groupe d’individus est venu perturber l’atmosphère chaleureuse et émouvante de cette cérémonie, distribuant des tracts agressifs, distillant leur haine et proférant des slogans antisémites.
Jamais je n’aurais pu imaginer que ce genre de démonstrations puisse se produire après la Shoah. Ayant vécu la Nuit de cristal à Vienne, âgé alors de 14 ans, ayant encore dans ma mémoire le souvenir des discours de haine, je sais à quelle incontrôlable catastrophe ces manifestations conduisent, si elles ne sont pas dénoncées, sanctionnées et éradiquées à temps.
Ces comportements sont indignes et contraires à l’esprit de notre République.

Aujourd’hui, Monsieur le Ministre, Mesdames et Messieurs les élus, si nous voulons donner un sens à nos commémorations et ne pas seulement évoquer le passé, nous devons tous, autorités politiques, autorités morales et citoyens, assumer un impérieux devoir : celui de combattre toutes les manifestations de haine et de violence."

(S) Paul Schaffer, Président du Comité Français pour Yad Vashem.

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jeudi 15 juillet 2010

P. 256. L'Arbre de la Mémoire à Tence

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(Ph.hephil.roux/BCFYV/DR).

Tence
Chaumargeais
Istor...
autant de lieux de résistance
à la Shoah

Le 20 juin de cette année, a été inauguré à Chaumargeais un Arbre de la Mémoire pour toutes les familles de persécutés qui trouvèrent un abri dans la région de Tence et en hommage à celles et ceux qui les ont aidées pendant la Deuxième guerre mondiale.
Depuis le même jour, à Istor, une plaque commémorative rappelle désormais l'"Ecole des Prophètes", ce noyau culturel juif au milieu d'une barbarie qui en cherchait la disparition complète.
Enfin, au Mazet, les époux Duron furent officiellement reconnus comme Justes parmi les Nations. La page 250 de ce blog a déjà décrit cette cérémonie en pays protestant.

Jean Gibert :

- "A l'initiative des Amis du vieux Tence, y a été inauguré L'Arbre de la Mémoire, en souvenir des familles persécutées et hébergées dans la commune et ses environs. Cette stèle se veut comme un hommage à tous ceux qui ont aidé ce peuple déraciné, recherchant au gré des rencontres, la sécurité, un toit, de quoi se nourrir et si possible un peu de chaleur humaine.

La sobriété de la cérémonie s'est conjuguée avec le recueillement des participants à l'écoute des mots du premier magistrat Tençois, Jean Digonnet, du président des Amis du vieux Tence, Michel Pabiou, suivis d'une brève intervention du secrétaire d'Etat, Laurent Wauquiez, et du récit de l'exode des juifs par Francis Weill, enfant caché alors avec sa famille au Mazet-Saint-Voy.

L'interprétation émouvante, a cappella, par Jean-Claude Fouillet de la chanson de Jean Ferrat, Nuit et brouillard, a précédé la découverte de la stèle, L'Arbre de la Mémoire. Après quoi, les participants sont montés jusqu'à « Istor » inaugurer une plaquette, expliquant le rôle de L'École des prophètes et écouter le témoignage de M. Michaeli, ancien consul de France et ambassadeur en Afrique, ayant été recueilli précisément à « Istor », par la famille Fournier."
(Le Progrès, 21 juin 2010).

Plaque apposée par les Amis du Vieux Tence (Ph.hephil.roux/BCFYV/DR).

Sur la plaque explicitant l'Arbre de la Mémoire de Tence, on peut lire cette citation d'André Chouraqui :

- "Je pédale jusqu'à ce que la lune apparaisse, et soit haut dans le ciel......
Demain nous chercherons....

J'ai en moi une vision terrible de l'agonie du monde et de l'indignité des hommes,
de notre indignité."

André Chouraqui :

- "André Chouraqui prend contact avec les réseaux naissants de la Résistance et devient le représentant de l'OSE (Œuvre de secours aux enfants juifs, entrée dans la clandestinité) en Haute-Loire et en Ardèche.

Pendant plus de deux ans, il sillonne les villages pour cacher des enfants et procurer des faux papiers aux réfugiés menacés de déportation. Il constate la solidarité agissante des pasteurs et des villages protestants à l'heure où la France fait la chasse aux juifs. Ses protecteurs du Chambon fournissent un poste d'enseignant et une pension amie à son maître Georges Vajda, qui s'établit ainsi à quelques kilomètres des Chouraqui.
Dans la clandestinité, il rencontre l'historien Jules Isaac.
Avec Albert Camus, également réfugié, ils jetaient les fondements de leurs œuvres réciproques.

Près de la demeure qu'il occupe dans le village, Jacob Gordin dirige "l'école des prophètes", noyau de la future école des cadres d’Orsay, où quelques intellectuels juifs pensent à ce que seront les lendemains de la guerre."
(Biographie officielle).

Dans la clandestinité : André Chouraqui et son épouse (Arch. fam./BCFYV/DR).

Fabienne Mercier :

- "Il a quatre-vingt-huit ans, une bouille drôlement sympathique. Son œil est malicieux, même si l'émotion le submerge, parfois. Lorsqu'il se souvient de l'asile que lui et ses amis, des jeunes gens, des intellectuels juifs, ont trouvé ici, en terre du Haut-Lignon, chez Lydie et Henri Fournier, pendant une partie de la Seconde guerre mondiale. Il se nomme Itzak Michaeli, il vit en Israël. Dans l'assistance, on le hèle en l'appelant tout simplement Micha.

Ce qu'il raconte paraît proprement surréaliste. Imaginez que dans la période où la traque des juifs, en vue de leur extermination, est à son apogée, dans une Europe à feu et à sang, Micha participait, à « Istor », un hameau de « Chaumargeais », commune de Tence, à un cercle juif d'études et de formation. De novembre 1943 à juillet 1944, ce séminaire spirituel et philosophique permanent poursuivait l'objectif de pérenniser et de transmettre les fondements d'une identité juive renouvelée.

On retrouvait là des personnalités remarquables. Les pivots de l'aventure étaient, au côté de Micha, Georges Levitte, Elie Rotnemer, Pierre Weill-Raynal. S'y ajouteront ensuite Jacob et Rachel Gordin, Georges Vajda. Graviteront encore sur le secteur d'autres penseurs réfugiés tels André Chouraqui, Léon Poliakov. Ils venaient, pour la plupart, de la branche clandestine des éclaireurs israélites de France, une structure liée au scoutisme.

Dans un moment de notre histoire où il faisait nuit noire, ces êtres se projetaient résolument dans le futur, avec optimisme. « Nous cherchions, tous ensemble, en amenant, chacun, nos apports particuliers, des éléments d'une pensée spécifiquement juive mais largement ouverte sur l'universalité et l'humanisme. »

L'été 44 verra cette communauté dispersée, les uns ralliant tel ou tel maquis ou poursuivant leur combat par d'autres moyens. Aujourd'hui, les chercheurs commencent tout juste à creuser cet aspect méconnu de l'Histoire. Par dérision tendre, ce cercle singulier s'était baptisé « L'École des prophètes »."
(Le Progrès, 21 juin 2010).

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vendredi 9 juillet 2010

P. 255. Hommage à Jenny Laneurie

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Diplôme amplement mérité par Jenny Laneurie (DR).

L'enfant cachée à Ernée
deviendra Secrétaire générale
du Comité Français pour Yad Vashem...

P. 234, ce blog donnait connaissance d’un Communiqué du Comité Français pour Yad Vashem marquant sa première réunion le 17 mai 2010.
En conclusion, on pouvait y lire :
- "Une courte cérémonie très émouvante a permis de remettre un diplôme de remerciements à M. et Mme Gérard Goldenberg et à Madame Moscovic, délégués de province pour leur dévouement inlassable au service de YAD VASHEM.
Madame Jenny Laneurie, ancienne secrétaire générale n’ayant pas pu être présente, son diplôme lui sera remis en main propre ultérieurement."

Lors de la dernière réunion du Comité directeur, Jenny Laneurie a reçu ce document marquant toute l’estime, l’attachement et la gratitude qui l’entourent, elle qui n’a jamais mesuré ses si bons et loyaux engagements auprès de Yad Vashem.

Essai de biographie :

Jenny est née en mai 1939 à Charleville. Première enfant de Raphaël Fresco et de Solange Niégo, tous deux d’origine judéo-espagnole.
De la péninsule espagnole, leurs ancêtres avaient été chassés au XVe siècle par les couronnes d’Aragon et de Castille vers Constantinople.
Puis en 1914, la branche Nessim Fresco émigre vers la France. Suivie par la branche Namer.

La fin de la Première guerre mondiale laisse les Ardennes françaises à l’état de ruines. Les Fresco ouvrent un magasin de bonneterie « Aux dentelles modernes », rue du Palais à Charleville. Victor Namer et son épouse Annette, née Fresco, tiennent un magasin Cours Aristide Briand…
Fils aîné des Fresco, Raphaël fait les marchés dont celui de la Place Ducale. Solange partage avec lui ce travail ambulant.

Quand frappe la guerre, les Ardennes doivent être évacuées de peur que la population ne revive les sévices et atrocités de 1870 puis de 1914-1918. Les Fresco décident de partir vers la même ville refuge que leur voisin, un boucher : Laval, dans la Mayenne. Leur exode passe volontairement par Fontainebleau où ils emportent Jeannette Niégo, veuve et mère de Solange.
Le 8 route d’Angers à Laval va devenir le nouveau foyer familial. Jacky, fils de Victor et d’Annette Namer, est le compagnon de jeu de Jenny.

Avec la guerre, Victor se trouve mobilisé. Certes il naquit en 1913 en Turquie mais ayant effectué son service militaire en 1931 sous l’uniforme français, il avait été reconnu citoyen français.
Quant à Raphaël, né en 1908, il est toujours de nationalité turque mais il s’est engagé volontaire dans la défense passive. Ambulancier à Charleville, il y retourne une fois les siens mis à l’abri à Laval.

Avec la percée de Sedan en mai 1940, les Ardennes sont encore et toujours mises à feu et à sang. La synagogue de Sedan est bombardée. Les réfugiés fuient les zones de combats. La Mayenne se trouve submergée sous un flot humain et désespéré de plus de 150.000 exilés. Pris dans le mouvement, Jenny et les siens abandonnent Laval pour Lonzac en Saintonge. Mais les envahisseurs vont toujours plus loin et plus vite. Leurs uniformes polluent la Mayenne dès le 17 juin. L’armistice est signée le 22. Le lendemain, les Allemands occupent la Charente-Inférieure. Les Fresco reviennent alors sur leurs pas et retrouvent le 8 de la route d’Angers à Laval.

Jacky et Jenny à Laval (Arch. fam. / BCFYV / DR).

Puis tombent les premières mesures antisémites. La famille, parce que juive, se trouve interdite de toute activité commerciale. A partir du 7 juin 1942, il leur faut – pour ceux âgés de plus de six ans – retirer à Laval une « étoile jaune » rendue obligatoire et remise contre un ticket textile…
Suivent les rafles. En Mayenne, une troisième vague est organisée les 9 et 10 octobre 1942.
Le 10 à 6 heures du matin, le monde bascule pour les Fresco. Pas moins de sept Feldgendarmes (plus leur interprète) viennent les embarquer pour un rassemblement près du stade de Laval puis un transport jusqu’au camp de Mulsanne-Le Mans.

Derrière les barbelés, se serrent les coudes :
- la grand-mère maternelle Jeannette Niégo,
- les grands-parents Nessim et Eugénie Fresco,
- les enfants de ces derniers, Raphaël (avec son épouse Solange et leur petite Jenny, 3 ans),
- Annette Namer et son fils Jacky, 4 ans (le père, Victor, est prisonnier de guerre au Stalag XIII),
- Samy, le cadet.

Au quatrième jour, les Allemands font sortir 35 juifs du camp eu égard à leur nationalité turque. A ces libérations s’ajoute celle des Niégo-Fresco-Namer… Alors qu’en réalité, seuls quatre d’entre eux ont leur nom sur les fichiers de la Préfecture avec la mention : « Turcs »…
La famille retrouve le 8 route d’Angers, tandis que la Shoah frappera les autres déportés de ce camp de Mulsanne.

Le 24 janvier 1944 reste une date marquante. Parvient une lettre de Paris et signée du père de Victor Namer. Pour transmettre cet avis affiché par l’Ambassade de Turquie : « A partir d’aujourd’hui, les Juifs Turcs seront considérés comme les Juifs Français. »
Raphaël cherche aussitôt comment échapper à une nouvelle arrestation suivie immanquablement d’une déportation…

Un forain oriente Raphaël vers un garagiste d’Ernée, Pierre Le Donné (résistant notoire). Ce dernier trouve un logement à Saint-Pierre des Landes dans la ferme de la famille Rousseau. Annette, Jacky et Salomon y sont accueillis. Le reste de la famille est hébergé au « Petit Poirier », une ferme du Rollon et appartenant aux Lambert mais exploitée par les Fauque. Ces derniers vont prendre tous les risques pour les persécutés.

Ce « Petit Poirier » ne comprend qu’une pièce unique surmontée d’un grenier accessible par une échelle. Et Annette, Jacky ainsi que Salomon finissent par y rejoindre la famille. Celle-ci porte désormais le nom de Fauque et passe pour des cousins de Paris ayant préféré se mettre au vert près de leur famille en Mayenne.
Commence une existence précaire. Avec l’obligation de nourrir sans tickets de ravitaillement 9 bouches nouvelles tout en échappant à la curiosité voire à la malveillance et même aux dénonciations. Une longue attente confine la famille derrière des couvertures tendues aux fenêtres et devant la porte d’entrée.

Puis les Alliés réussissent leur débarquement en Normandie mais cherchent ensuite longuement à percer les lignes allemandes. Le 5 août 1944, un résistant d’Ernée, René Justin, va guider les Américains. La ligne de front est mouvante et le « Petit Poirier » reste entre les deux ennemis trois jours encore…

Les Fresco auront finalement échappé à la Shoah. Ceux réfugiés en Mayenne. Hélas pas les oncles, ni une sœur de la grand-mère Fresco, ni une tante de Jacky, ni les Fresco de Lonzac-Reims.

Suite aux dossiers constitués par Jenny (devenue l’épouse d’un enfant caché, Jean-Yves Laneurie) ont été reconnus Justes parmi les Nations :
- Pierre Le Donné,
- Auguste et Marie-Louise Fauque,
- Michel et Françoise Rousseau.

Début 1992, alors qu’elle décrochait une licence en Hébreu (Langues O’ ), Jenny Laneurie devint bénévole du Comité Français pour Yad Vashem. L’exemple et les conseils amicaux de Louis Grobart jouèrent leur rôle dans cet engagement qui la conduisit aux responsabilités du Secrétariat général sous la Présidence de Richard Prasquier.
Fin 2007, Jenny Laneurie souhaita qu’un blog vienne compléter le Site internet du Comité Français pour Yad Vashem. Voilà comment depuis janvier 2008, ce blog tente de répondre à cet honneur et à ce travail de mémoire : informer en temps réel et régulièrement, au nom du Comité, sur les nouveaux Justes de France et les persécutés sauvés de la Shoah.

Remise à Jenny Laneurie de son diplôme (Ph. J-P Gauzi / BCFYV / DR).

NOTES :

- Pour une information complète sur l’histoire des Fresco, il vous est recommandé de lire
Marc Betton, Histoire des familles Fresco, Namer, Niégo, de Charleville à Ernée et retour, 1939 à 1945, Ed. à compte d’auteur, Ernée, 2009, 52 p.

- Parmi les activités de Jenny Laneurie, se détache AKI ESTAMOS, l'Association des Amis de la Lettre Sépharade.

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jeudi 8 juillet 2010

P. 254. Cérémonie à Chitenay

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Mairie de Chitenay (DR).

Les Justes
Sylvine Girault et
Blanche Renée Grillet

Le 4 juillet 2010, les Médailles de Justes parmi les Nations ont été remises - à titre posthume - aux ayant-droits de Sylvine Giraul et de Blanche Renée Grillet. Cette cérémonie avait pour cadre la Mairie de Chitenay. Elle avait été préparée par le Maire, Didier Stetten Pigasse, ainsi que par le Délégué du Comité Français pour Yad Vashem, Didier Cerf.
Blanche Renée Grillet était représentée par son fils, Gérard. Tandis que Sylvine Girault l'était pas ses enfants Lucette Chauveau, Mireille Choquet, Bernard Girault, Madelaine Guellier et Anne-Marie Pinault.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Chaïm Fizicki avait trouvé l’asile politique en France. Il avait fui la Pologne et espérait achever dans son pays d’accueil des études de biologie. Son chemin croise celui d’une autre réfugiée polonaise avec laquelle il se marie. Pour faire face aux nécessités de la vie, lui devient tailleur tandis qu’elle devient couturière à domicile.
Le foyer (à Nancy) s’agrandit grâce à deux naissances :
- Ilicz, en 1933 et
- Claire en 1935.

Nancy devant être « germanisée » du fait de la guerre et de la défaite, la famille Fizicki prend les routes de l’exode. D’abord pour Bordeaux. Ensuite jusqu’à Libourne. Enfin, en 1941, ils arrivent à Civray dans la Vienne où ils sont arrêtés en juillet.
Les persécutés parviennent à s’échapper. Mais hélas, un an après, soit en septembre 1942, la mère est à nouveau arrêtée. Elle est transférée à Drancy d’où elle sera déportée – sans retour - vers Auschwitz.

Une grave maladie a évité au père de subir le même sort. Son état le rendait intransportable. Il décide alors et dans l’urgence, de placer les deux enfants dans des familles à Chitenay (Loir et Cher) avec l’aide d’une parente active elle-même dans le sauvetage des enfants.
Illicz est confié à Mme Grillet et Claire à Mme Girault. L’instituteur – qui était également secrétaire de mairie – et sa femme fournissent des fausses pièces d’identités pour les petits. Tous deux sont baptisés pour ne pas éveiller de soupçons (mais ils retrouveront leur religion d’origine après la Libération).

Le mari de Blanche-Renée Grillet était prisonnier en Allemagne. Le couple avait un fils, Gérard. Illicz a été traité en parfaite égalité avec ce jeune Grillet. Les deux garçons aidaient aux travaux de la ferme, s’occupaient des animaux, etc.

Quant à Sylvine Girault, elle était veuve avec cinq enfants à charge ! La famille était vraiment pauvre. Madame Girault faisait des ménages et aidait à la cueillette des fruits dans les fermes. Cette femme aussi généreuse que courageuse accueillit Claire comme la sixième des enfants de sa famille nombreuse.

A la Libération, Chaïm s’était engagé dans l’armée régulière. La guerre enfin terminée, il est venu rechercher ses enfants orphelins de leur mère morte à Auschwitz."

En fin de cérémonie : "Le Chant des Partisans" (DR).

La Nouvelle République :

- "Dimanche, en fin de matinée, l'heure était à l'émotion sur la place de la mairie, le maire Didier Stetten-Pigasse accueillait tout un cortège de personnalités et les familles mises à l'honneur, venues assister à la célébration d'un événement exceptionnel. Un moment insolite dans une ambiance où l'émotion était palpable puisque deux médailles des Justes étaient remises à deux Castanéens à titre posthume.

C'est Didier Cerf, délégué régional du comité français pour Yad Vashem qui remettra aux enfants de Blanche Grillet et Sylvine Girault la médaille des Justes parmi les Nations. Une distinction décernée par l'Institut Yad Vashem de Jérusalem aux personnes non juives ayant sauvé des juifs sous l'Occupation, au péril de leur vie. Les actes de bravoure de Blanche Grillet, représentée par son fils Gérard, et de Sylvine Girault, représentée par ses enfants, Lucette Chauveau, Mireille Choquet, Bernard Girault, Madelaine Guellier, Anne-Marie Pinault ont été évoqués à travers la lecture faite par les arrière-petits-enfants. Un moment très émouvant en particulier pour Claire et Léon, les deux enfants juifs présents à la cérémonie recueillis par les deux familles françaises.

Le préfet Philippe Galli, le député Nicolas Perruchot, la sénatrice Jacqueline Gourault ont tour à tour salué le courage de ceux qui ont risqué leur vie pour en sauver d'autres. Enfin, « Le Chant des partisans » fut joué par la descendance Girault et reprise en choeur par l'ensemble des invités."
(7 juillet 2010).

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mercredi 7 juillet 2010

P. 253. Rapport d'activité pour le 1er semestre 2010

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Du 1er janvier au 30 juin 2010 :
Blog du Comité français pour Yad Vashem.

53 nouvelles pages :

4 : janvier
5 : février
7 : mars
8 : avril
11 : mai
18 pages : juin.

9.416 visiteurs
pour
13.368 visites
soit
43.136 pages consultées (moyenne : 3,23 pages par visite).

Répartition mensuelle des visites :

1887 : janvier
1837 : février
2393 : mars
2172 : avril
2451 : mai
2628 : juin

Visites depuis 90 pays dont en ordre décroissant :

11.285 : France
512 : Belgique
280 : Israël
227 : USA
197 : Suisse
161 : Canada
105 : Allemagne


Origines des visites :

41,82% : moteurs de recherches
38,20 % : sites de référence
Moins de 20% : trafic direct.

Réf : Google Analytics UA-4318655-1.
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P. 252. Henriette Beaudiot, Juste parmi les Nations

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Cérémonie à Monts

Le 27 juin 2010, la Médaille et le Diplôme de Juste parmi les Nations ont été remis à titre posthume à Henriette Beaudiot. Fille de la défunte, Lucette Joseph les a reçus lors d'une cérémonie organisée par Didier Cerf, délégué du Comité Français pour Yad vashem.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Originaire de Lorraine, Henriette Beaudiot habitait avec sa fille, Lucie, à Monts, plus précisément au lieu dit Chauveau. La mère avait alors 46 ans et Lucie 18 ans.
Toutes deux font la connaissance des époux Gerofi, des réfugiés autrichiens, lesquels évoquent le sort de Patrick et de Sonia Danemans ainsi que de leur fils Sacha (dit Alexandre). Ces derniers sont des juifs de Lettonie. Arrêtés à Bordeaux, ils avaient été envoyés au camp de La Lande, près de Monts.

Patrick Danemans y était resté interné tandis que sa femme Sonia et leur fils Sacha pouvaient résider à Tours.
De fil en aiguille, Sonia vint se reposer chez Henriette Beaudiot à qui la mère rongée d’angoisses répétait constamment :
"Si, un jour, il m'arrivait quelque chose, promettez-moi de garder mon petit ".

En conséquence d’une opération aux oreilles, Patrick Danemans fut libéré du camp pour être assigné avec sa famille rue Origet à Tours. Les Danemans y invitaient régulièrement Henriette Beaudiot et Lucie.
Survient la rafle du 16 juillet 1942.
Patrick et Sonia Danemans sont arrêtés rue Origet à Tours. Emmenés d’abord à l'École Normale de Saint-Symphorien (Tours), ils sont ensuite internés à Angers puis déportés sans retour vers Auschwitz.

Et Sacha ?
Lors de la rafle, le propriétaire de l’appartement de la rue Origet cache le garçon toute la nuit, puis le met dans le train pour Monts où Sacha rejoint Henriette Beaudiot.
Celle-ci va faire passer Sacha pour un neveu.
Le Docteur Mercier, maire de Monts, remet un certificat de dispense scolaire au garçon afin qu’il ne soit pas obligé de fréquenter l'école communale. Une dame viendra lui donner des cours à domicile deux à trois fois par semaine.

Sacha va échapper à la Shoah. Ce ne sera hélas pas le sort des Gerofi. Logés eux aussi chez Henriette Beaudiot, ils sont arrêtés à leur tour. Et déportés sans retour vers Auschwitz en octobre 1942.

A la Libération, l’orphelin Alexandre (Sacha) Dannemans va rester chez Henriette Beaudiot et reprendra ses études."

La Juste Henriette Beaudiot (Arch. fam. / BCFYV / DR).

Témoignage au Collège de Monts :

- "Mon arrière grand-mère était Mme Beaudiot Henriette, âgée de 46 ans au moment de cette histoire et ma grand-mère, Mme Joseph Lucie, alors âgée de 18 ans.
(…) Sacha arriva chez mes grands-mères qui habitaient juste à côté de la gare avec sa valise, pensant que ses parents étaient au coin de la lande.
Hélas!...

Mon arrière grand-mère le garda chez elle en le faisant passer pour un neveu de l'est, elle-même étant originaire de la Lorraine. Un certificat du Docteur Mercier, maire de Monts, permit à Alexandre de ne pas fréquenter l'école communale (peur de l'accent?).
Quant à ses parents, arrêtés à Tours, rue Origet, ils furent emmenés à l'école normale de Saint Symphorien (Tours), déportés à Angers, puis à Auschwitz. Patrick fut tué à la sortie du camp parce qu'il ne marchait pas assez vite et Sonia est morte dans la chambre à gaz.

Monsieur et Madame Gerofi, alors qu'ils logeaient chez mes grands-mères depuis trois mois, ont été arrêtés, puis déportés au mois d'octobre 1942, également à Auschwitz. Des scellés avaient été posés sur la chambre qu'ils occupaient."

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lundi 5 juillet 2010

P. 251. "Sans Aristides de Sousa Mendes..."

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(Ph. J-P Gauzi / BCFYV / DR).

La mémoire d’Aristides de Sousa Mendes
rappelée au Panthéon

- "Aristides de Sousa Mendes, consul général du Portugal à Bordeaux en juin 1940, a accompli à lui tout seul l’une des plus grandes actions de sauvetage pendant la Seconde Guerre mondiale : 30 000 visas, délivrés en moins de 10 jours, malgré les ordres formels qu’il avait reçus de Salazar et qui lui interdisaient d’ouvrir les portes du Portugal, alors zone neutre. Du 17 au 21 juin 1940, il a distribué des visas et des faux passeports à tous ceux qui lui en ont fait la demande, sans distinction de race, de nationalité, de religion ou de conviction politique.

Parmi les personnes qu’il a sauvées, on compte 10 000 Juifs, français et européens, mais aussi des Républicains espagnols, des opposants au nazisme, des responsables politiques, notamment une grande partie des gouvernements européens qui ont pu s’exiler à Londres (notamment le gouvernement polonais) ou rester au Portugal (comme le gouvernement belge par exemple).

Traduit en juillet 1940 devant le Conseil de discipline, Aristides de Sousa Mendes est condamné en octobre 1940, rétrogradé, démis de ses fonctions ; il meurt en 1954, pauvre et oublié de tous. Il ne sera réhabilité par le Portugal qu’à titre posthume, en 1988. Auparavant, il avait été reconnu comme Juste parmi les Nations en 1966 par l’Institut Yad Vashem, ce titre étant discerné aux personnes ayant sauvé au péril de leur vie des Juifs persécutés.

A l’initiative du comité national français en hommage à Aristides de Sousa Mendes (http://www.sousamndes.org/), un voyage à Paris et à Bordeaux réunissant les descendants d’Aristides de Sousa Mendes et les descendants des personnes qu’il a sauvées, eut lieu du 21 juin au 26 juin 2010, afin de commémorer le 70 ème anniversaire de l’action de Sousa Mendes.

L’un des temps forts de ce voyage fut la visite du Panthéon par la délégation qui, à l’invitation du Comité Français pour Yad Vashem et de son président M. Paul Schaffer, se recueillit devant la plaque en hommage aux Justes de France gravée dans la crypte du Panthéon.

Cette plaque avait été apposée en 2007, à la suite d’une cérémonie nationale en présence de Jacques Chirac, alors président de la République française et de Simone Veil, présidente d’honneur de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, qui avait été à l’origine de cette initiative, permettant la reconnaissance du rôle des Justes dans le lieu symbolique de la reconnaissance des valeurs de la République, où sont rassemblés les grands hommes qui ont marqué l'histoire de France.

Au cours de la Seconde Guerre Mondiale, 6 millions de Juifs, de 21 pays d’Europe sous domination nazie, furent exterminés. En France, 76.000 juifs, dont 11. 000 enfants, furent déportés. Seuls 2.550 revinrent ; aucun enfant ne se trouvait parmi eux. Toutefois, les trois quart des Juifs, en France, ont eu la vie sauve. Ceux qui ont survécu le doivent souvent à des hommes et des femmes, non juifs, qui n’écoutant que leur conscience, les cachèrent, les protégèrent et les sauvèrent ainsi de la mort. Célèbres ou anonymes, de tous âges et de toutes origines, de toutes appartenances religieuses et politiques et de tous milieux sociaux, ces hommes et ces femmes d’honneur avaient pour dénominateur commun le respect des valeurs morales, le rejet du fascisme et le courage d’agir malgré les risques encourus.

Le Comité Français pour Yad Vashem est une association française régie par la loi de 1901, fondée en 1989. Constituée presque exclusivement de bénévoles, il est chargé de faire connaître et d’honorer les Justes parmi les Nations de France et de soutenir le Mémorial de Yad Vashem de Jérusalem dans sa mission de mémoire et d’enseignement. Ce Comité instruit les dossiers des Justes qui lui sont soumis et les transmet à Yad Vashem Jérusalem, seule autorité habilitée à délivrer le titre honorifique de « Juste parmi les Nations » au nom de l’Etat d’Israël. Ce titre est la traduction de l’expression hébraïque "Hassidé Oumot Haolam", qui, dans le Talmud, était utilisée, depuis l’Antiquité, pour qualifier les non-juifs « vertueux, œuvrant avec compassion et justice »."
(Communiqué du Comité Français pour Yad Vashem).

Aristides de Sousa Mendes, Juste parmi les Nations, lire aussi la page 222 de ce blog (DR).

- "Mardi 22 juin 2010, à l’invitation du Comité Français pour Yad Vashem, une délégation du Comité national français en hommage à Aristides de Sousa Mendes, réunissant des descendants d’Aristides de Sousa Mendes et des descendants des personnes qu’il a sauvées, s’est recueillie devant la plaque rappelant l’action des Justes de France, gravée dans la crypte du Panthéon, et a rendu hommage à l’action du Consul portugais en 1940, l’une des « lumières dans la nuit de la Shoah ».

M. Paul Schaffer a accueilli la délégation conduite par le Président du Comité Sousa de Mendes, M. Dias et par Mme Hellen Kaufmann, en présence de plusieurs membres du Comité français pour Yad Vashem, dont M. Jean Raphael Hirsch Vice-Président, M. Jean Pierre Gauzi, Secrétaire Général, M. Charles Finel, M. Léon Borocin, M. Paul Ejchenrand, Mme Alice Tajchman, secrétaire générale de la Fondation pour la mémoire de la Shoah et Mme Rachel Rimmer, chargée de la communication de la FMS, et Mme Anne-Marie Revcolevschi, Présidente du Projet Aladin et membre du Comité directeur du comité français de Yad Vashem.

Après que le Président Paul Schaffer ait rappelé les missions et la raison d’être de Yad Vashem Jérusalem et Paris, et se soit réjoui d’accueillir cette délégation, M. P. Monnet, administrateur du Panthéon, a présenté brièvement le Panthéon en retraçant son histoire depuis sa construction, achevée en 1789, jusqu’à nos jours."
(Communiqué du Comité Français pour Yad vashem).

Cliquer sur la photo pour l'agrandir (Ph. J-P Gauzi / BCFYV / DR).

- "Mme AM Revcolevschi, qui fut la directrice générale de la FMS jusqu’en 2009, a expliqué la genèse de l’entrée des Justes au Panthéon en 2007 ; elle a résumé les moments forts de la cérémonie très impressionnante qui se déroula en présence du Président de la République Française , M. Jacques Chirac, de Mme Simone Veil, présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, à l’initiative de cette démarche, et de très nombreuses personnalités françaises et étrangères : les discours, le film d’Agnès Varda et l’installation, dans la nef, des photographies de Justes côtoyant celles des acteurs du film. Elle a rappelé plus particulièrement les raisons qui furent à l’origine de cette initiative : contrer le négationnisme orchestré par le président iranien, combattre l’antisémitisme renaissant en France tout en refusant l’image d’une France antisémite, rappeler ainsi l’action des Justes de France dont la majorité, restée anonyme, ne pourrait jamais être formellement reconnue par Yad Vashem Jérusalem.

Quant à M. Aristides de Sousa Mendes destiné à incarner les diplomates, parmi les différentes catégories de personnes ou d’institutions qui sauvèrent les Juifs de la déportation et de la mort, elle a expliqué qu’avec Alice Tajchman, leur choix s’est porté sur le Consul portugais : consul général du Portugal à Bordeaux en juin 1940, il avait, en effet, accompli, à lui tout seul l’une des plus grandes actions de sauvetage pendant la Seconde Guerre mondiale : 30 000 visas, délivrés en moins de 10 jours, malgré les ordres formels qu’il avait reçus de Salazar et qui lui interdisaient d’ouvrir les portes du Portugal, alors zone neutre. Du 17 au 21 juin 1940, il distribua des visas et des faux passeports à tous ceux qui lui en ont fait la demande, sans distinction de race, de nationalité, de religion ou de conviction politique.

Parmi les personnes qu’il a sauvées, on comptait, 10 000 Juifs, français et européens, mais aussi des Républicains espagnols, des opposants au nazisme et des responsables politiques.

M. M.Dias, président du Comité Aristides de Sousa Mendes, a alors remercié les différentes personnalités pour leur présence et rendu hommage à Mme Simone Veil et à son inlassable combat pour la mémoire ; il a souligné l’importance de cette cérémonie pour la famille du consul et insisté sur son action exemplaire dont l’actualité doit être pour chacun un appel à la vigilance devant les tentations de la haine, du racisme, de la xénophobie."
(Communiqué CFYV).

Devant le panneau des Justes, dépôt d'une gerbe par Lissy Jarvik et Paul Schaffer (Ph. J-P Gauzi / BCFYV / DR).

- "Puis la délégation s’est rendue dans la crypte, dans la galerie du 20e siècle.

Après que Mme Revcolevschi ait lu à haute voix le texte inscrit sur la plaque en hommage aux Justes, M. Paul Schaffer et Mme Jarvik qui, avec sa famille alors réfugiée de Hollande, avait été sauvée par M. de Sousa Mendes, ont déposé une gerbe de fleurs au pied du panneau où est relatée l’action des Justes pendant la guerre en France. Après une minute de silence, la délégation a visité la crypte avant d’aller assister à la projection d’un documentaire sur Yad Vashem.

A la suite du film, l’un des petits-fils d’Aristides de Sousa Mendes, venu du Canada, a pris la parole pour dire, au nom de la grande famille d’Aristides de Sousa Mendes qui fut contrainte à l’exil à la suite des actes de Résistance de leur grand-père, combien il se réjouit de voir qu’aujourd’hui, l’action de leur grand-père est entrée dans l’Histoire. Mme Jarvik, pour sa part, a exprimé sa reconnaissance à celui grâce auquel est doit la vie. Mme Revcolevschi a conclu, à l’instar de M. Dias, en appelant chacun à la vigilance et à la lucidité afin de ne pas se laisser entraîner par les discours de propagande et de haine dont l’actualité nous abreuve."
(Communiqué CFYV).

Introduction aux 10 pages du témoignage confié à Yad Vashem par Lissy Jarvik (DR).

Lissy Jarvik :

- "Without Aristides de Sousa Mendes I would not be here.
It's as simple as that.
Without Aristides de Sousa Mendes I would have suffered tortures
so grievous and so prolonged
that death would have been a welcome relief.
Without Aristides de Sousa Mendes I would have missed out
on half a century
half a century wich allowed me to breathe; to live, to love,
to mature, to marry, to have children, to study, to teach
and to help a few people individually as well as to
contribute a little bit to our knowledge base on aging and mental health.
And I would have missed out on a becoming part of a country
a counrty wich offered opportunity to
the disenfranchised, the downtrodden, the needy
to people like me."
(26 janvier 1996).

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