vendredi 25 juin 2010

P. 250. Cérémonie au Mazet-Saint-Voy

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Remise du Diplôme et de la Médaille aux enfants et aux petits enfants des Justes (Ph. hephil.roux / BCFYV / DR).

Daniel Duron et son épouse
Evodie Duron-Jonac
Justes parmi les Nations

Fabienne Mercier :

- {Ce 20 juin 2010} A la mairie du Mazet-Saint-Voy, lorsque la voix de Jean Ferrat retentit et que les mots de sa chanson Nuits et brouillards cognent dans les esprits, l'émotion est palpable. Il est bien difficile pour les participants, juifs ou non, croyants ou non-croyants, jeunes ou vieux, ne pas laisser les larmes embuer leur regard. De même à l'issue de la cérémonie lorsque le chant des déportés, le Chant des marais, est repris en chœur.

La foule des grands jours est au rendez-vous. On vient saluer la mémoire d'habitants du Mazet-Saint-Voy, un couple marqué par sa foi protestante, qui vivait à Mazelgirard.
Pendant la guerre, ils ont procuré un logement à la famille Weill originaire des Vosges et l'ont entouré de leur sollicitude.

Evodie Jonac et Daniel Duron reçoivent, à titre posthume, le diplôme et la médaille des Justes.
Ce sont leurs enfants et petits-enfants, Paul, Marc, Marguerite, André, Dina et Dany, qui sont honorés.

Des discours, on retiendra cet extrait de celui de Bernard Cotte, le premier magistrat : « A notre époque où l'on tend, dans nos communes, à bâtir des légendes, il est bon de rappeler que la mémoire collective, celle du peuple du plateau se souvient de tous ces gens accueillis, du rire de leurs enfants. L'exemple d'Evodie et Daniel est très représentatif des événements de cette période. Ils ont fait au nom de leur foi profonde ce que d'autres ont réalisé au nom de leur simple humanité. » Il ajoute : « La mémoire que nous célébrons aujourd'hui est une mémoire exigeante. Elle nous rappelle que l'exemple de nos parents ne nous invite pas à une molle acceptation des événements du monde. Nous devons exercer un examen critique sur les scènes de violences qui nous parviennent. Nous devons protéger les faibles, ceux qui sont persécutés, les accueillir et les soutenir. »

De l'intervention de Dany Duron, fils d'Evodie et Daniel, on gardera à l'esprit la conclusion. « En tant que croyant, lorsque j'ai monté ce dossier pour que mes parents obtiennent ce titre de Justes, je n'ai pu m'empêcher de m'interroger. « Comment serons-nous trouvés justes devant Dieu ? »
(Le Progrès, 21 juin 2010).

Les deux Justes : Evodie et Daniel Duron (Mont. BCFYV / DR).

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Gaston Weill et Adrienne Geismar sont nés dans le Haut-Rhin. Ils se marient en 1931.
Gaston Weill est négociant en textiles à Mulhouse.
Quatre enfants naissent au sein de ce foyer, Jean, Francis, Gilbert et Jacqueline.

Gaston Weill, mobilisé en 1939, est libéré de ses obligations militaires après la naissance de la petite Jacqueline en février 1940.
D’avril 1940 au 12 juin 1940, Mulhouse étant sur la ligne de front, Adrienne Weill et ses enfants fuient au Val d’Ajol dans les Vosges.
Puis, le 14 juin 1940, laissant Jacqueline chez sa nourrice, la famille quitte les Vosges et se réfugie en Haute-Loire dans une auberge du hameau du Mas-de-Tence.
Enfin, en octobre 1940, les époux Weill trouvent un logement rue de St Agrève à TENCE.
En 1941 la nourrice, passant la ligne de démarcation, conduit Jacqueline auprès de ses parents.

En 1943, la traque des Juifs s’intensifie, les époux Weill ne se sentent plus en sécurité.
Lors d’une première alerte, la famille Weill passe la nuit hors de son appartement, chez des connaissances de Tence.
La décision est prise de chercher un logement de substitution afin de s’éloigner de Tence, tout comme le font d’autres familles juives demeurant dans ce bourg.
Confiant leurs enfants à une réfugiée allemande, M. et Mme Weill partent, à pied, à la recherche d’un nouveau refuge. Deux jours de recherches n’ont rien donné, ils rentrent désespérés.

Louise Astor, cheftaine de scouts protestants, mise au courant par le Pasteur Leenhardt (nommé Juste parmi les Nations en 1991), interroge les enfants Weill, eux-mêmes scouts. Elle propose l’aide de sa famille. Celle-ci les met en contact avec les propriétaires de la ferme voisine, le couple Duron.

Daniel et Évodie Duron qui ont six enfants de 6 à 17 ans, Daniel Elie, Dina, André, Marguerite, Marc, Paul, acceptent sans hésiter de loger cette famille juive dans une aile de leur ferme. C’est l’ancien appartement des parents d’Évodie Duron, M. et Mme Jonac décédés.

Les gens de la Gestapo sont aperçus dans le bourg. Ils sont à la recherche d’une famille juive et logent à l’hôtel de la Lionchère contigu au lieu de résidence de la famille Weill. Celle-ci quitte discrètement Tence et rejoint Mazelgirard, hameau de la commune du Mazet-St-Voy.

Les enfants Weill, dont les parents ont de faux papiers au nom de Vial, et les enfants Duron, fréquentent l’unique classe du hameau. Ils partagent leurs jeux, leur goûter et même les travaux des champs.
M. et Mme Duron entourent de leur affection ces réfugiés, mettent à disposition un coin de leur potager, apportent à leurs protégés légumes, beurre, œufs et même du pain lorsqu’ils le cuisent.
Cela évite aux Weill de retirer des tickets d’alimentation auprès de la mairie de Tence.

Ces Protestants furent guidés par le seul désir de venir en aide à ces personnes persécutées.
Les familles Weill et Duron sont toujours restées amies."

Vue du public - cliquer sur la photo pour l'agrandir (Ph. hephil.roux / BCFYV / DR).

Clément Weill-Raynal :

- "Quel rapport y a-t-il entre le boycott anti-israélien et une cérémonie de remise de médaille des Justes au plus profond de la campagne française ? A priori, aucun.
Pourtant, je voudrais vous raconter l’incident dont j’ai été témoin hier à Mazet-Saint-Voy, un petit village de Haute-Loire. Pour des raisons personnelles et familiales j’ai assisté à la remise d’une médaille des Justes aux descendants d’une famille de la commune, qui avaient caché des juifs pendant la guerre. De nombreux habitants étaient présents dans la salle des fêtes, des juifs étaient également venus de Paris et d’Israël, la cérémonie était émouvante, l’atmosphère chaleureuse, jusqu’à ce qu’une dizaine de militants pro-palestiniens viennent perturber la réunion, en distribuant des tracts et en appelant au boycott d’Israël, devant une assemblée médusée.
Mais quel rapport y a-t-il entre le sauvetage des juifs pendant la guerre par une poignée de chrétiens héroïques et l’appel, 70 ans plus tard, au boycott d’Israël ? Aucun…
…Si ce n’est que la terrible confusion – l’inversion des valeurs, opérée par les militants pro-palestiniens – permet de mieux comprendre comment les antisémites d’aujourd’hui travestissent l’histoire sans vergogne pour donner un visage présentable à la haine qu’ils nourrissent à l’égard des Juifs."
(Mis en ligne le 22 juin 2010, par Menahem Macina, sur le site France-Israël.org).




P. 249. Cérémonie à Chelles (2)

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De g. à dr. : Régine Sigal, Déléguée du Comité Français pour Yad Vashem,
Jean Paul Planchou, Maire de Chelles,
Laurent Mestre, Attaché à l'Ambassade d'Israël en France,
Frédéric du Laurence, ancien Ambassadeur.
(Ph. V. Chelles/BCFYV/DR).

Henri-Joseph et Marie Degrémont
Justes parmi les Nations

Sur la page 243 de ce blog était annoncée la cérémonie marquant la reconnaissance à titre posthume d'Henri-Joseph et de Marie Degrémont comme Justes. Ceux-ci ont en effet protégé de la Shoah Joseph et Liba Goldsztajn ainsi que leur fils Henri.

La Mairie ainsi que les deux déléguées du Comité Français pour Yad Vashem, Nicole Caminade et Régine Sigal avaient veillé à ce que cet événement laisse dans les mémoires des traces lumineuses. Tout y concoura. La qualité des intervenants comme de l'attention soutenue aussi bien qu'émue du public. L'apport de musiciennes du Conservatoire. Le cadre fleuri...

Henri Goldsztajn et son père, Joseph en 1944 (Ph. Arch. fam. / Mont. BCFYV / DR).

Présentation des Justes par les Déléguées du Comité Français :

- "Nous sommes réunis ici ce soir pour honorer le courage de ce couple, qui n’hésita pas à se mettre en péril pour accueillir, cacher et sauver plusieurs familles juives pourchassées par les nazis, dont Joseph-Aron GOLDSZTAJN, son épouse Liba et leur fils Henri.

Venant de Pologne, Joseph-Aron est arrivé à Paris en 1936. Joseph est boucher de profession. Il trouve aisément du travail et sa femme et son fils Henri le rejoignent en 1938. La famille vit rue Julien Lacroix, dans le 20e arrondissement, dans un immeuble contigu à la boucherie dont elle est propriétaire. La petite Hélène naît en janvier 1940.

Engagé dès septembre1939 dans un régiment de Volontaires Etrangers, le père est démobilisé en juillet l940 à Caussade, puis envoyé dans un camp de travail à Marseille. Grâce à un certificat de travail fourni par des amis, il rejoint sa famille et parvient à se cacher dans Paris lors de la grande rafle de juillet 1942. Cette nuit-là, sa femme sauve sa vie et celle de ses enfants en prenant le risque de ne pas répondre aux coups donnés sur la porte par les Allemands.

Pour les protéger, les parents placent alors leurs enfants à Villepinte. Un peu plus tard ils passent en zone libre avec leur fils, laissant Hélène chez sa nourrice.
En novembre 1942, la zone libre est envahie. Ils remontent alors sur Paris où ils apprennent que plusieurs familles juives sont cachées aux Coudreaux, quartier de Chelles.

C’est ainsi que, fin 1943, ils arrivent chez les DEGREMONT qui hébergent déjà des juifs mais qui n’hésitent pas à les accueillir. Ils vont pouvoir vivre en sécurité jusqu’à la Libération, alors que plusieurs autres familles dénoncées sont arrêtées puis déportées. Leurs noms figurent sur la stèle érigée en face de la Mairie, avec ceux des Martyrs de la Cascade du Bois de Boulogne et des otages fusillés.

Les rapports des DEGREMONT et des GOLDSZTAJN sont si chaleureux que les parents décident de leur confier leur fille Hélène, à la fin des hostilités, durant une année."

Ayant-droit des Justes, leur neveu, Jacques Langlois, reçoit leur Diplôme des mains de Laurent Mestre, Attaché à l'Ambassade d'Israël en France (Ph. V. Chelles / BCFYV / DR).

De g. à dr. : Régine Sigal, CF pour Yad Vashem; Hélène Gutowski, enfant cachée; Jean Paul Planchou, Maire de Chelles (Ph. V. Chelles / BCFYV / DR).

Hélène Gutowski-Goldsztajn avait tenu à effectuer le voyage depuis l'Argentine pour marquer sa reconnaissance aux époux Degrémont, eux qui empêchèrent la Shoah d'emporter ses parents et son frère.
Le témoignage de cette autre enfant cachée a été recoupé avec le dossier Yad Vashem des nouveaux Justes et proposé sur la page 243 de ce blog.

NOTE : Notre gratitude à la Ville de Chelles, à Hélène Gutowsi, à Jenny Laneurie ainsi qu'aux déléguées du Comité Français pour Yad Vashem, Nicole Caminade et Régine Sigal, pour leurs précieux apports aux pages 243 et 249.

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P. 248. Cérémonie au Parvis des Justes à Lille

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Invitation à la cérémonie de Lille, le 24 juin 2010.

Léon et Claire Dubois
Justes parmi les Nations

Lille : à l'angle de la rue des Tanneurs et de la rue de Béthune, le Parvis des Justes a servi de cadre à une cérémonie de reconnaisance de Justes parmi les Nations, ce 24 juin 2010.
Préparée par Didier Cerf ainsi qu'Annie Karo, Délégués du Comité Français pour Yad Vashem (1), cette cérémonie marquait l'attribution du diplôme et de la Médaille de Justes - à titre posthume - au couple Léon et de Claire Dubois.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "En 1939, Chil Mohr et Lina Ruck qui ont émigré de Pologne dans les années 20, habitent rue de Rocroi à Lille avec leur fils unique Léo, né en 1932.
Chil Mohr est marchand forain.Très engagé à gauche, il écrit dans des journaux et revues yddish et mène de nombreuses activités culturelles.

Au cours de la débâcle de Mai 1940, devant l’invasion nazie, la famille Mohr fuit sous les bombes et se réfugie dans le Morbihan où elle reste deux mois avant de retourner à Lille.

1942 : la vie devient très difficile : lois anti juives, port de l’étoile jaune , rafles...
Le 16 juillet 1942, c’est la rafle du Vel d’hiv. Chil Mohr apprend l’arrestation de sa jeune soeur Henna avec ses deux filles Charlotte, 6 ans et Léa, 3 ans. Elles seront déportées à Auschwitz le 26 août 1942 et ne reviendront pas.

La famille décide alors de fuir en zone "libre". Grâce à de faux papiers fournis par des résistants à la Préfecture de Lille, ils franchissent la ligne de démarcation et rejoignent le reste de la famille Ruck à Gan où ils sont accueillis comme réfugiés.
Dans ce village du Béarn, prés de Pau, la vie s’organise : Léo va à l’école primaire puis en octobre 1943, fait sa rentrée en 6 ème comme interne au Lycée Louis Barthou de Pau.

Mais en novembre 1943, la zone "libre" connaît l’occupation nazie, l’étau se resserre sur les juifs. Des rafles ont même lieu dans les classes, les professeurs recommandent la fuite.
Prévenu d’une rafle imminente par des résistants de Pau, Chil Mohr fuit et se cache à Oloron-Sainte Marie.
Lina et son fils Léo décident de rester, mais ils sont surpris au petit matin par des miliciens et ont juste le temps de s’enfuir à travers champs.
Lina se dirige vers la ferme Mirassou dans le petit village des monts de Bosdarros, chez la famille Dubois qu’elle connaît pour y avoir parfois acheté du lait et des œufs.

Léon et Claire Dubois habitent avec le grand père et 3 de leurs 6 enfants Juliette, 18 ans, Alfred, 13 ans et Irène, 11 ans alors que les 3 aînés, Robert, Jean Louis et Germain sont prisonniers de guerre en Allemagne.
Lina est accueillie avec chaleur et compréhension.
Après un bref échange de paroles, les Dubois acceptent tout naturellement de garder ce petit garçon juif, et lorsque Lina tend à Claire Dubois un petit sachet contenant quelques bijoux au cas où elle ne reviendrait pas, Claire refuse et lui dit : « Nous avons élevé 6 enfants, Léo sera le 7ème ».

Léo passera une année heureuse entourée d’une vraie famille généreuse et souriante.
En Septembre 1944, c’est la libération : Léo retrouve ses parents et il se souvient encore aujourd’hui, avec émotion des retrouvailles des deux familles à Mirassou.
En 1945 la famille Mohr regagne Lille où la vie reprend son cours.

Léon Dubois est décédé en 1950.
Lina Mohr et Claire Dubois entretiendront une correspondance régulière jusqu'au décès de Claire."

Léon et Claire Dubois (Arch. L. Mohr / Mont. BCFYV / DR).

Témoignage par Léna, petite-fille de Léo Mohr (2) :

- "Chil MOHR (18 ans) et Lina RUCK (16 ans) mes arrières grands-parents sont arrivés en 1920 de Galicie, province autrichienne devenue polonaise.
Mariés à Lille en 1928, ils habiteront le quartier Saint Sauveur : rues de Tournai, Charles Saint-Venant, Rocroi...place Simon Vollant.
Léo, mon grand-père, naît en 1932.

Chil, Charles désormais, est marchand forain mais surtout passionné de culture Yiddish : il écrit de la poésie il fait chanter des chorales et écrit dans la presse juive de gauche, où il exprime son engagement politique. Lina le seconde dans ces taches.

Léo va à l'école Carnot au pied du beffroi.
Lille est une ville riante, défilés de géants Lyderic et Phynaert et les géants flamands invités. D'autres défilés derrière des drapeaux, avec les copains de la rue de la Vignette. Et triste la ville à la mort du maire Roger Salengro.

Mai 40. La débâcle sous les stukas et les bombes. Abbeville, Eu, Dieppe, Rouen seront rasés derrière eux. Ils sont réfugiés à Auray en Bretagne. Lorient brûle au loin.

1940/41 à Lille, les pénuries sont supportées avec courage, mais les prisonniers sont retenus encore en Allemagne et l'oppression politique est lourde.
1942.Les lois antijuives sont appliquées avec toutes leurs violences. Port obligatoire de l'étoile jaune à partir de l'âge de 6 ans. On peut lire « Juif »en lettres noires.
L'entrée en classe de Léo qui porte cette étoile cousue sur le vêtement crée un brouhaha. Le maître, Monsieur Bodaert, calme les élèves avec des mots justes et élogieux et recommande à Léo de ne plus revenir en classe.

Juillet 1942 au Vel d'hiv. Hanna, ses deux filles : Charlotte 6 ans, Léa 3 ans sont raflées et déportées vers Auschwitz, elles ne reviendront pas.
Hanna était la plus jeune soeur de mon arrière grand-père.
La survie passe par la fuite en zone libre. Grâce aux excellents faux papiers fournis par des résistants de la préfecture de Lille ils franchissent les lignes.
Samuel RUCK, frère de Lina, ne franchira pas cette ligne, il sera déporté à Auschwitz et ne reviendra pas.
Ils rejoignent enfin leur famille Ruck à Gan prés de Pau où ils sont très bien accueillis comme réfugiés.

La vie reprend, Léo va à l'école communale puis au lycée Louis Barthou à Pau. Octobre 1943 les nazis envahissent la zone libre. Les professeurs recommandent alors aux enfants juifs de quitter les classes devant les menaces de perquisitions policières et S.S.

Prévenu par des résistants, d'une rafle imminente, mon arrière grand-père fuit dans la nuit et se cache à Oloron.
Lina et son fils Léo restent mais sont surpris au petit matin par des miliciens de Vichy, menaçants.
Ils ont juste le temps de fuir à travers champs.
Ils se dirigent alors vers la ferme Mirassou dans les monts de Bosdarros, qu'ils connaissent pour y avoir acheté du lait et des oeufs.

Léon et Claire DUBOIS, le grand père Candegabe y habitent avec trois enfants : Juliette 18 ans, Alfred 13 ans et Irène 11ans.
Les trois fils aînés Robert, Jean-Louis, et Germain sont prisonniers en Allemagne.
Lina est accueillie avec chaleur et compréhension.
Quelques mots brefs, les Dubois acceptent tout naturellement de garder ce petit garçon juif, et lorsque Lina tend à Claire un petit sachet contenant quelques bijoux au cas ou elle ne reviendrait pas.
Claire refuse et dit doucement :
- « Nous avons élevé 6 enfants, Léo sera le 7ème ! »

Léo passera une année heureuse entourée d'une vraie famille généreuse et souriante.
Le 6 Juin 1944 : le facteur a bien du mal à grimper la côte, il a trop fêté le
Débarquement des Alliés en Normandie...
Septembre 1944. C'est la LIBERATION.
Léo se souviendra toujours avec émotion du bonheur des familles retrouvées à
Mirassou.

En 1945 la famille Mohr regagne Lille.
Léon Dubois décèdera en 1947.
Lina Mohr et Claire Dubois entre tiendront une correspondance régulière jusqu'au décès de Claire.

Au Nom des neuf arrières petits enfants de Lina et Charles, je remercie Claire et Léon et salue leur mémoire.
Je salue Robert, Juliette, Alfred, Irène leurs enfants et petits enfants."

De g. à dr. : S. Ravel, Irène Boutillon, M. Aubry, Juliette Paty, Alfred Dubois, Léo Mohr (DR).

Témoignage de Léo Mohr :

- "La belle histoire de ma rencontre avec la famille DUBOIS commence dans les petites rues de GAN, dans les heures qui ont suivi la rafle du matin. Les miliciens rôdent encore. Pas de retour possible à la maison. Ma mère n'a qu'une idée : me confier vite à une famille. Nous marchons vers les collines de Bosdarros, assez haut déjà il y a bien la ferme Lajous. Nous les connaissons fort bien, ils acceptent de nous héberger, de nous cacher donc, mais ils sont âgés et garder un enfant c'est une autre affaire !
Essayez plus haut il y a les Dubois.

En effet la ferme Mirassou semble bien séduisante. La famille est dans la cour, surprise de nous voir arriver. Léon est stupéfait du récit par ma mère des
circonstances de la rafle. Ma mère demande qu’on garde son fils, en attendant des jours meilleurs. Claire, la maman, Juliette, Alfred, Irène les enfants présents écoutent en silence. Tous acceptent de garder ce petit garçon. Bien sûr il est admis qu'il n'ira pas à l'école. Irène ajoute : j'aurai un nouveau petit frère, tout le monde sourit.

Les tâches nouvelles font de Léo un fermier enthousiaste, car les bêtises sont
accueillies avec sourire !
Comme ce jour où il est rentré en lambeaux, piétiné par le troupeau de moutons.
Je t'avais pourtant dit de surveiller le bélier !
Comme ce jour où nous avons dévoré un cageot de cerises destiné à la vente au marché; il reporte l'achat de chaussures. Toujours avec le sourire.
J'ai même été autorisé à dresser Loulou, mon chien, à garder les vaches.
Claire est pleine d'attention, elle essaie bien de nous gâter avec des inventions pâtissières à base de maïs et de châtaignes.

La situation devient tendue, des parachutages d'armes ont lieu la nuit. On parle de dénonciations, nous quittons la ferme pour la nuit.
Léon déterre le fusil enfoui dans la vigne et refuse de quitter sa ferme.
Les soirées d'hiver sont longues, sans radio, sans phono, sans télé.
Nous mangeons des châtaignes autour du feu, nous égrenons le maïs et nous chantons.
J'ai bien essayé de leur apprendre le ptit quinquin, sans succès mais j'ai pu apprendre le bet ceu de Pau.
Ma mère a appris : « Oyfn pripitschik » à Irène et ce à mon insu. Irène chante à ce jour parfaitement en Yiddish cette chanson. Irène était chargée de me la rappeler un jour, si ma mère devait ne pas revenir.
« Oyfn pripitschik » semble une comptine destinée au BA-BA, mais la chanson se termine par ce conseil :
« Enfant, si un jour le poids de l'exil te paraît écrasant, va voir dans le livre ».

Je suis arrivé avec mon Yiddish interdit, et le Petit Quiquin et je suis reparti avec l'hymne béarnais Le beth ceu de PAU…"


NOTES :

(1) Délégués du Comité Français pour Yad Vashem, Didier Cerf et Annie Karo ont non seulement organisé cette cérémonie mais encore veillé à documenter cette page du blog.

(2) Enfant caché et à l'initiative de la nomination de ces nouveaux Justes parmi les Nations, Léo Mohr publie un blog "relatant les circonstances de sa rencontre avec la générosité et le courage".
Il vous invite à le consulter et à le diffuser.

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jeudi 24 juin 2010

P. 247. Le sauvetage de Louise Daouda

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Cérémonie à la Mairie de Sanvensa.
Debouts, de g. à dr. :
- Louise Daouda, enfant cachée,
- Shmuel Sivan, Consul d'Israël à Marseille,
- Suzette Clapier, Maire de Sanvensa,
- Albert Seifer, Délégué du Comité Français pour Yas Vashem.
Assis : André Falippou, fils des Justes, et son épouse.
(Ph. C. Gordon / BCFYV / DR).

Alfred et Marie-Emilie Falippou
Justes parmi les Nations

Compte-rendu de la cérémonie du 20 juin 2010 :

- "Dans la moderne mairie de ce village de 650 habitants, situé à une dizaine de kilomètres de Villefranche de Rouergue, une cinquantaine de personnes assistèrent à une cérémonie émouvante au cours de laquelle André, 90 ans, le fils d’Alfred et Marie-Emilie FALIPPOU et leurs nombreuses petites-filles reçurent la médaille des Justes décernée à titre posthume à leurs parents et grands-parents.
Alfred et Marie-Emile hébergèrent et ainsi sauvèrent, dans leur ferme du « Portail Bas » Louise DADOUA , alors âgée de 9 ans, benjamine d’une famille de 8 enfants et originaire d’Algérie. Celle-ci, venue de Marseille, évoqua avec émotion la façon dont elle fut accueillie comme une enfant de la famille.

Une petite-fille Falippou remercia chaleureusement Yad Vashem.

Etaient présents : Mme Suzette CLAPIER, maire très sympathique de Sanvensa, Mr Shmuel SIVAN Consul d’Israël à Marseille et le Dr Albert SEIFER délégué régional du Comité Français pour Yad Vashem."
(Compte-rendu d'Albert Seifer).

A l'avant plan, Louise Daouda, enfant cachée par les Falippou (Ph. Arch. Fam. / BCFYV / DR).

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Maklouf Daouda est né en Algérie, en 1891. Il est boulanger. En 1912, il épouse Hanna Bittoun. En 1926, le couple arrive en France.
Ils auront 8 enfants : Marcel Gaston (1913-1994), Gilberte (1915-1998), Lucienne (1918-1998), Léon (1922-1991), Simone (1925-1996), Paul Haim (1928-1985), Jules (1930, décédé en bas âge), Georges (1932-1983) et Louise (née en 1934).

Malouf décède à Marseille à l’âge de 46 ans. Sa veuve, 42 ans, aidée de sa mère, élève les huit enfants en faisant des ménages. La famille habite à Marseille, 15, rue Sainte-Anne, dans le quartier du Vieux Port.

Lorsque la guerre éclate, Marcel Gaston, l’aîné, est prisonnier de guerre en Allemagne.
Gilberte habite à Montpellier.
Lucienne vit à Peyrolles avec son fils Robert, 5 ans, et son mari Charles Hadjadj. Né en Algérie en 1912, ce dernier sera dénoncé et déporté sans retour vers Kaunas par le convoi n° 73 du 15 mai 1944.
Léon est résistant sous le nom d'André Fabreguette.

Lors de la grande rafle des 22 et 23 janvier 1943 à Marseille, Hanna Dadoua et quatre de ses enfants, Simone, Paul et Georges et Louise, sont arrêtés par les soldats Allemands et la Milice. Ils sont conduits au Vieux Port, entassés dans des wagons, dirigés vers la gare de triage de Fréjus et internés dans un camp de tirailleurs sénégalais. Ils y restent parqués huit jours dans des conditions abominables.
Là, Simone amadoue un Milicien chargé de la surveillance. Il s’arrange pour les faire renvoyer sur Marseille. Puis Hanna Daouda et les siens parviennent à gagner Montpellier et s'installent 12, rue de l'Université.

Par mesure de sécurité, Georges et Paul sont placés dans un couvent dirigé par l'abbé Prévôt à Montpellier.
Louise est conduite au couvent des Dames de Nevers à Cahors.
Hanna, sa mère et Simone restent réfugiées à Montpellier.

Fin 1943, le petite Louise est évacuée avec d’autres enfants sur Villefranche-de-Rouergue. Louise est attendue à la gare par M. et Mme Vialar qui tiennent une épicerie. Denise, la fille des Vialar, âgée de 19 ans, s'y occupe de Louise avec douceur et gentillesse. Mais, la grande maison des Vialar vient à être réquisitionnée par les Allemands.
La petite Louise est alors confiée à des amis des Vialar qui habitent Sanvensa, à 8 km de Villefranche. L’enfant cachée découvre ainsi Alfred et Maria Falippou, agriculteurs et leurs deux enfants, André, né en 1920, et Yvette, née en 1922.

Les Falippou font passer leur protégée pour la fille d’une amie, enfant venue "se refaire une santé à la campagne".
Louise avait alors 10 ans. Elle garde le souvenir de sa petite chambre avec une couette en plumes d'oie, du bon lait, des vendanges et de la maison pleine d'amour.
Quand elle le peut, Hanna Daouda vient embrasser sa fille et repart toujours avec des paniers chargés de victuailles.

A la Libération, Louise sera partagée entre le bonheur de retrouver sa maman et la grande tristesse de quitter les Vialar… »

Le Midi Libre :

- "Louise Dadoua a permis à leurs petites-filles (Anne-Marie, Josiane, Françoise, Paulette et Danièle), de connaître la vérité sur cette période.
« Que ce soient mes grands-parents, ma mère et mon oncle, et même les voisins, personne ne nous en a jamais parlé », explique Danièle, l'une des deux filles d'Yvette, et qui s'est chargé avec André son époux, de monter le dossier.

« C'est au travers du dossier que l'on a découvert l'histoire. Dans le reste de la famille, on ne voulait pas trop remuer ces vieilles histoires. Avec mon mari, on s'est lancé en se disant qu'on allait peut-être le regretter. Mais si on ne l'avait pas fait, le dossier n'aurait pas abouti (...) . Aujourd'hui, tout le monde est heureux que l'on soit allé jusqu'au bout."
(Reportage de Xavier Rousseau, ).

NOTE : Délégué du Comité Français pour Yad Vashem, Albert Seifer a participé à la rédaction de cette page. Qu'il en soit remercié.

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P. 246. Cérémonie au Couvent de Massip (Capdenac)

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Le Couvent de Massip : havre de paix pour 83 juifs alors que sévissait la Shoah (DR).

Armand et Célestine Vergnes
Justes parmi les Nations

Compte-rendu de la cérémonie du 20 juin 2010 :

- "Une foule nombreuse se pressait le 20 juin 2010 dans la chapelle de N.D. de Massip (avec une forte représentation toulousaine venue en car spécial affrété par le Comité Français pour Yad Vashem et l’Amitié Judéo-Chrétienne ).
La cérémonie eut lieu en présence du maire, Mr Stéphane BERARD, du Consul d’Israël à Marseille Shmuel SIVAN, du représentant du Conseil Général, de Mr DELBOS président des associations de l’ITEP dont celle de Massip, et du Dr Albert SEIFER, délégué régional du Comité français pour Yad Vashem.
Celui-ci, enfant caché comme 82 de ses camarades dans ce même couvent de N.D de Massip , entre décembre 1942 et juillet 1944, rappela le rôle capital de Mgr Jules-Géraud SALIEGE, archevêque de Toulouse, Compagnon de la libération, Juste parmi les Nations et cardinal en 1946, dans le sauvetage des enfants juifs, aidé par son évêque auxiliaire Louis de Courrèges d’Ustou, Mme Denise BERGON directrice du couvent, Mme Marguerite ROQUES son fidèle bras droit et Mlle Louise THEBE secrétaire des œuvres du diocèse : tous quatre Justes parmi les Nations.

Albert Seifer rappela les liens d’amitié qui l’unissent au témoin, Maurice GERBER depuis 1945. Alors âgé de 8 ans, Albert Seifer avait été caché et sauvé de 1942 à 1945 par Armand et Célestine VERGNES qui possédaient une boyauderie à Capdenac.
Ce fut un instant très émouvant lorsque le Consul d’Israël Shmuel SIVAN relata l’histoire de ce sauvetage et remit la médaille des Justes et le diplôme d’Honneur aux enfants VERGNES Pierre et Ginette. Le Bné Brit de Toulouse, sur l’initiative de son président Max MARQUES, offrit deux livres sur Israël aux enfants Vergnes.

Une exposition de Yad Vashem "Ce ne sont pas des jeux d’enfants" retint l’attention du public ainsi qu’un DVD de 17 minutes sur la SHOAH et passant en boucle.

L’après-midi, les enfants cachés de N.D. de Massip : Annie BECK, Alexandre PREDZESKI de Nancy, Monique BARKATE, Serge POTOK placé à Pradinas (ainsi que Léon KOPEL), sa sœur Suzanne ALTER et Albert SEIFER témoignèrent devant une nombreuse assistance attentive de ce que fut leur passage à N.D de Massip, entourés de l’affection de « leurs mamans de la guerre »."
(Compte-rendu rédigé par Albert Seifer).

Cérémonie en l'honneur des Justes Vergnes.
De g. à dr. : Ginette SOULACROIX-VERGNES et Pierre VERGNES, les enfants d’Armand et Célestine VERGNES ; Maurice GERBER ; Mr Shmuel SIVAN Consul d’Israël ; Mr Stéphane BERARD maire de Capdenac ; Dr Albert SEIFER délégué régional du Comité Français pour Yad Vashem.
(Ph. C. Gordon / BCFYV : DR).

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "La famille Gerber est originaire de Galicie (sud-est de la Pologne) et arrive en France en 1932.
Les parents, Jacques et Sabine, ont alors deux filles :
- Dora, 18 ans
- Sarah, 15 ans
- et un garçon : Oscar 9 ans.

Après un bref séjour à Metz, la famille arrive à Capdenac ( Aveyron ) où Jacques vend des vêtements sur les marchés tandis que ses filles travaillent dans la boyauderie de Mr Armand Vergnes.
Puis les Gerber quittent l’Aveyron pour Toulouse où naît en 1934 une second garçon : Maurice.

En 1941, alors que l’antisémitisme ne cesse de frapper, Oscar est placé à l’abri en Suisse. Mariées toutes deux, Dora et Sarah se cachent dans la région toulousaine. Jacques passe la guerre caché dans une pièce confinée à Toulouse.
Maurice, 7 ans, est confié à Armand et à Célestine Vergnes. Ce couple le cachera de 1941 à 1944.

Le petit juif va grandir en compagnie des enfants Vergnes : Pierre et Ginette ainsi que d’un autre gosse d’origine polonaise, lui aussi recueilli. Considéré et traité comme s’il était vraiment de la famille, Maurice sera scolarisé de 7 à 10 ans.

Une seule alerte viendra troubler Capdenac. Un jour, une compagnie de soldats allemands se livrera à des exercices dans le village. Maurice doit se cacher sous un lit tout l’après-midi….

A la Libération, Jacques Gerber pourra reconstituer sa famille à Toulouse."

Armand et Célestine Vergnes, Justes parmi les Nations (BCFYV / DR).

La Dépêche :

- «J'attends de vous d'héberger des enfants juifs. » Monseigneur Saliège, archevêque de Toulouse, avait convoqué sœur Denise Bergon, directrice du couvent de Massip lors d'un entretien en août 1942. « Je vais être obligée de mentir », avait-elle prévenue alors, Mgr Saliège avait alors répondu : « Mentez, mentez, vous aurez toutes mes absolutions. »

Albert Seifer, représentant de Yad Vashem à Toulouse, raconte ce pan d'Histoire, car c'est aussi son histoire. Il a sept ans, lorsqu'il arrive en gare de Capdenac et que Denise Bergon vient le chercher en voiture à cheval pour l'accompagner au couvent. Sa sœur Berthe a 11 ans. Ils seront tous les deux hébergés et cachés par sœur Denise Bergon et sœur Marguerite Roques de mars 1943 au mois de mai 1944 (les sœurs avaient demandé aux parents de venir chercher les enfants à l'annonce de l'arrivée de la division Das Reich).

«Nous étions logés au couvent et les garçons étaient scolarisés à Saint-Julien-d'Empare. J'ai été enfant de chœur car les sœurs, pour mieux nous cacher, nous avaient appris les prières et les chants… »
(20 juin 2010).

NOTE : Cette page a été rédigée avec la participation d'Albert Seifer, qu'il en soit remercié.

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mercredi 23 juin 2010

P. 245. Sauvetage de Liba Kornfeld, de Chaja Gitel Rabinovici, de son fils Simon et d'Armand Finkenberg

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Invitation à la cérémonie du 22 juin 2010, Mairie du 13e ar. de Paris (DR).

Paul et Augustine Fiket
Justes parmi les Nations

La Médaille et le Diplôme de Justes parmi les Nations ont été remis à André Fiket, fils des deux Justes défunts, ce 22 juin 2010. Cette cérémonie s'est déroulée à la Mairie du 13e arrondissement de Paris sur invitation du Maire, Jérôme Coumet, de l'Adjointe chargée de la Mémoire et du Monde combattant, Catherine Vieu-Charier et du Comité français pour Yad Vashem qui avait délégué Viviane Saül et Alain Habif.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Moïse Rabinovici a été arrêté comme juif et interné au camp de Beaune-la-Rolande, dans le Loiret. Transféré ensuite à Drancy, il a été emporté par le convoi n°53 vers Sobibor où il décéda le 30 mars 1943.
Son épouse, Chaja Gitel Rabinovici, née Kornfeld, trouva refuge dans le 13e arrondissement. En effet, accompagnée de sa mère, Liba Kornfeld, elle fut accueillie par Paul et Augustine Fiket (née Conrath) au 113 de l'avenue d'Ivry à Paris.
Pourquoi avoir frappé à la porte des Fiket ?
D'origine croate, Paul Fiket était un camarade de travail de Moïse Rabinovici. Tous deux étaient ouvriers métallurgistes."

Présentation de la synthèse par Alain Habif, délégué du Comité français pour Yad Vashem (Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Suite de la synthèse :

- "Paul et Augustine Fiket avaient pleinement conscience de risquer leur vie en cachant des persécutées raciales. Ils ont agit par humanité, par compassion et par amitié.

Le couple Rabinovici avait un fils : Simon. Dès l'arrestation de son père Moïse, le bébé fut confié à des paysans de Mercatel, dans le Pas-de-Calais.
En 1944, Augustine Fiket monta vers le Nord pour y retirer l'enfant ainsi que son cousin, Armand Finkelberg, caché là aussi.

La grand-mère Liba Kornfeld, la mère Chaja Gitel Rabinovici, le fils Simon et le cousin Armand Finkelberg échappèrent ainsi à la Shoah...

Jusqu'à son décès en 1970, la mère de Simon eut à coeur de maintenir des contacts avec les époux Fiket et leurs trois enfants."

Portrait de Paul et d'Augustine Fiket (Arch. fam. / BCFYV/ DR).

Extrait de la présentation de Yad Vashem :

- "Créé par une loi du Parlement Israélien en 1953, l’Institut Yad Vashem doit son nom à un verset du chapitre 56 du prophète Isaïe dans la Bible. Il y est écrit : "Et je leur donnerai dans ma maison et dans mes murs, un mémorial (YAD), et un nom (CHEM), en hébreu Yad vashem (mémorial et nom), qui ne s’effaceront jamais".
Cette phrase rend hommage aux Justes parmi les Nations que l’Institut est chargé de reconnaître. Elle est gravée au recto de chaque médaille au nom de l’Etat d’Israël et en signe de gratitude.
Au verso elle comporte la mention "Qui sauve une vie, sauve l’univers tout entier", extraite du Talmud « loi orale ».

Le mémorial Yad Vashem, situé sur la Colline du Souvenir à Jérusalem, a donc pour but de perpétuer la mémoire des six millions de Juifs, de 21 pays d’Europe sous domination du IIIe Reich et qui furent exterminés, par les Nazis et leurs complices. En France, 76.000 juifs furent déportés, dont 11.000 enfants, seuls 2.550 rescapés revinrent des camps d’extermination et aucun enfant ne se trouvait parmi eux. Toutefois, les trois quart des juifs en France ont eu la vie sauve."


Présentation de Yad Vashem et de son Comité français par Viviane Saül, Déléguée (Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Yad Vashem et les Justes (suite) :

- "Ceux qui ont survécu le doivent à des hommes et des femmes non juifs, qui n’écoutant que leur conscience, les cachèrent, les protégèrent et les sauvèrent d’une mort certaine. Célèbres ou anonymes, ces héros étaient de tous âges et de toutes origines, de toutes appartenances religieuses et politiques et de tous milieux sociaux.
Ces hommes et ces femmes d’honneur avaient pour dénominateur commun le respect des valeurs morales, le rejet du fascisme et le courage d’agir malgré les risques mortels encourus. Ces inconnus qui les ont accueilli n’exigeaient rien à l’époque et n’en demandent pas plus aujourd’hui, ils estimaient avoir accompli leur devoir, c’est avec naturel et simplicité qu’ils sont venus au devant des personnes en danger. Ils les ont hébergées, cachées, nourries, leur ont souvent procuré de faux papiers, et ont déployé en leur faveur toute leur énergie et leur imagination, en un temps où il n’était pas bien vu de fréquenter les Juifs, encore moins de les aider, alors que la majorité de la population était, au mieux, passive ou indifférente. Ces Justes ont non seulement sauvé des vies humaines, mais ils ont aussi incarné l’honneur de l’humanité, qui grâce à eux, n’a pas totalement sombré à Auschwitz.

Arracher des Juifs à la Shoah ne fut pas seulement une addition d’actes individuels extraordinaires mais aussi parfois et beaucoup plus rarement, le résultat d’actions collectives.
Voilà pourquoi Yad Vashem a également reconnu comme Justes le Chambon-sur-Lignon (France), le village de Nieuwlande (Pays-Bas), le réseau Zegota (Pologne) et le royaume du Danemark pour son réseau de résistance.

Dans un monde où les discours, les actes de haine et de xénophobie, d’antisémitisme et de diabolisation d’Israël progressent, le rappel des valeurs qu’ont incarnées les Justes hier, nous rappellent à nos responsabilités aujourd’hui : Défendre les valeurs de justice et de paix. L’intolérance, le racisme ne peuvent servir de base à quelque société que ce soit, tout autour de nous dans le monde ces principes sont utilisés par des pouvoirs dictatoriaux ou soi-disant démocratiques, par des groupes sectaires ou intégristes pour justifier arrestations, massacres et génocides."

De g. à dr. :
- Armand Finkenberg, enfant caché,
- André Fiket, fils des Justes avec leur Diplôme,
- Simon Rabinovici, enfant caché.
(Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Extrait du discours de Catherine Vieu-Charier, Adjointe :

- "Il y a 70 ans, dans la défaite de la France, la barbarie nazie qui avait programmé depuis 1933 l'exécution de la solution finale pour les juifs, va la mettre en route dans notre pays, avec la complicité active du gouvernement de Vichy.
(…)
En France même, le pays des Lumières et des droits de l'Homme, des valeurs de la République, le pays où tant d’hommes ont écrit et pensé l’intelligence de l’humanité, le pouvoir de Vichy se déshonore, en établissant dès le 3 octobre 1940, le sinistre statut des Juifs, qui les exclut de presque toutes les fonctions.
Les Juifs de France sont frappés de plein fouet dans leur amour pour la France par cet antisémitisme d'État, dans un pays est celui qui dès 1791, leur a accordé les droits des citoyens.
Les juifs étrangers qui avaient choisi le pays dont on disait que l’on y était heureux comme Dieu en France sont catastrophés.
Tous aiment leur pays passionnément. Ils se sont battus pour lui, en 1914 ou en 1939. Et pourtant Pétain, le vainqueur de Verdun, se déshonore en accompagnant cette politique de mort, et en devançant même les désirs de l’occupant nazi.
Il y a la honte du premier convoi de déportation, le 27 mars 1942. Il y a l'ordonnance allemande du 7 juin avec le signe inimaginable et honteux de l'étoile jaune.
Et puis, le 16 et le 17 juillet, la grande rafle du Vel d’Hiv va emmener des centaines de familles vers la mort, les plaques apposées sur les écoles parisiennes donne l’ampleur du désastre.
La même horreur aura lieu du 26 au 28 août, avec la rafle de milliers de Juifs étrangers en zone libre."

Photo : prononçant son discours, Catherine Vieu-Charier (Ph. V. Saül / BCFYV / DR).

Suite du discours :

- "Mais dans la France affamée, terrorisée, coupée en deux par la ligne de démarcation, des voix s'élèvent, des gens refusent. Des Françaises et des Français en très grand nombre vont montrer que les valeurs de l'humanisme sont enracinées dans leurs coeurs. Partout, ils accueillent, cachent, sauvent au péril de leur vie des enfants, des femmes, des hommes, persécutés parce qu'ils sont Juifs.
Dans ce cauchemar éveillé que les Juifs vivent depuis 1940, la France, leur France, à laquelle ils ont cru si intensément, n'a pas tout à fait disparu. Dans les profondeurs du peuple, une lueur d'espoir brille. Elle est fragile, mais elle existe.
Des milliers de femmes et d’hommes, sans s'interroger, vont faire le choix du courage. Ils viendront de toutes les classes sociales, dans toutes les professions, de tous les courants religieux ou politiques. Tous connaissent les risques encourus : la dénonciation, l’arrestation par la gestapo, la milice, parfois par la gendarmerie et la police. Les interrogatoires et les tortures suivis par le peloton d’exécution ou la déportation.
Mais par mille actions, petites ou grandes, ils vont cacher, protéger et arracher à la mort des centaines de milliers de juifs.
Certains ont été reconnus Justes parmi les nations. Beaucoup d'autres resteront anonymes, parce que c’est ainsi, la vie reprend, les gens sont modestes et il a fallu du temps aussi pour revenir sur ces évènements. Certains sont honorés comme aujourd'hui, avec les époux Fiket, presque 70 ans après."

NB : cette page repose sur les apports de Viviane Saül, Déléguée, qu'elle en soit remerciée.

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mardi 22 juin 2010

P. 244. 7 Justes à Abondant

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Cérémonie d'Abondant. Discours de Pierre Osowiechi, délégué du Comité Français pour Yad Vashem (Ph. Christian De Vimal / BCFYV / DFR).

Aimé Breton,
son fils Roger
et sa belle fille Thérézia,
Albert et Marguerite Moreau,
leur fille Geneviève
et son mari René Gastelais,
Justes parmi les Nations

Des centaines de personnes, et pas seulement des Abondantais, se sont retrouvées le 13 juin dernier pour honorer les Justes ayant protégé de la Shoah la famille Ringart Istrach.
Médailles et diplômes ont été remis aux ayant-droits par le représentant de l'Ambassade d'Israël en France. Cette cérémonie à l'ampleur exceptionnelle avait été préparée par Pierre Osowiechi, Délégué du Comité Français pour Yad Vashem.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

- "Ce dossier a été ouvert grâce aux efforts d'Anna Ringart. Celle-ci est née en 1937.
Son père, Noha Ringart, provenait de Lodz via Berlin. Il prit ses nouvelles racines en France à partir de 1933 et comme photographe d'agence.
Sa mère, Paula Oistrach, était native d'Odessa. Elle émigra d'abord en Allemagne avant de choisir la France en 1933, elle aussi. Après des études aux Beaux-Arts, elle devint tisserande à la main.
Le couple s'est connu à Paris. Peu avant l'occupation, il fut inscrit sur les Registres de la population à Gif-sur-Yvette.

Pour les Ringart comme pour tant d'autres, la guerre vient tout bouleverser.
La petite entreprise de tissage associant Paula Ringart et Germaine Volpe vient à manquer de matières premières. Il faut trouver de la laine brute. C'est ainsi que Paula fait la connaissance de Geneviève Gastelais, épouse d'un marchand de moutons de la Beauce."

Les Justes Geneviève et René Gastelais (Mont. BCFYV / DR).

"Puis les menaces antisémites se précisant et se multipliant, Geneviève Gastelais propose d'accueillir chez elle, au Mesnil-sur-Estrées, Paula Ringart, sa mère Rosa Oistrach et la petite Anna, âgée alors de 5 ans.
Geneviève fait alors appel à un parent, Aimé Breton. Cet instituteur exerce également la charge de secrétaire de mairie. Celui-ci va devenir l'organisateur du sauvetage des trois fugitives, et ce, jusqu'à la Libération."

Aimé Breton, Juste parmi les Nations (BCFYV/DR).

"Aimé Breton va préparer des lieux d'accueils successifs pour éviter que les trois persécutées ne restent trop longtemps dans la même cachette. Il veille à leur fournir de faux papiers de qualité. Et s'assurera de leur ravitaillement régulier.
Le périple de la grand-mère, de la maman et de la fillette débutera donc au Mesnil-sur-Estrées, chez les Gastelais. Il va se pousuivre chez les parents de Geneviève, Albert et Marguerite Moreau, à Abondant. Puis dans la famille de la belle-fille d'Aimé, Thérézia Breton née Mousseigne à Boissy-St-Laurent la Gâtine.
Grâce à leurs faux papiers, Paula et sa fille Anna portent elles aussi le nom de Mousseigne. Rosa Oistrach deviendra une Durand..."
            
Les Justes Albert et Marguerite Moreau (Mont. BCFYV / DR).

"Institutrice, Thérézia Breton veille à la scolarité de la petite Anna. Hélas, un propos imprudent tenu à l'école oblige les trois juives à disparaître dans un nouveau refuge. Ce sera la Maison des Grès près d'Abondant.

Si ces trois générations successives de persécutées connurent la Libération, quel fut le sort des autres membres de leur famille ?
- Noah Ringart resta caché au troisième étage de la maison-atelier de Germaine Volpe à Gif-sur-Yvette.
- Mari de Rosa et père de Paula, Isay Oistrach connut une première alerte en étant interné comme étranger en 1940. Libéré, il fut à nouveau arrêté en novembre 1942 et déporté sans retour à Auschwitz.

Après guerre, la famille Ringart a gardé des liens privilégiés avec Aimé Breton et tous leurs autres sauveurs."

Discours du maire d'Abondant (Ph. Ch. De Vimal / BCFYV / DR).

Christian de Vimal du Bouchet, maire d'Abondant :

- "Ces Justes que nous honorons, firent il y a 65 ans, des gestes qui relevaient pour eux de l'évidence...
Tardive mais nécessaire, cette reconnaissance va à ce que la France a de meilleur, ces hommes et ces femmes qui ont fait le juste choix !"

Prenant la parole à la cérémonie d'Abondant, Jeanne-Lise (Anna) Dittman-Ringart (BCFYV/DR).

Anna Dittman-Ringart :

- "j'ai une pensée particulière pour la soeur de Thérézia qui a prêté son nom. Une âme restée dans l'ombre...
Vous les Justes de France et du monde, vous avez le coeur à la bonne place !
Je n'ai jamais douté que ce dossier de reconnaissance éternelle irait à son terme."

Lionel Beffre, préfet d'Eure-et-Loir :

- "… Pendant que ceux qui avaient opté pour la collaboration bafouaient les principes de liberté et de justice qui fondent la République et effaçaient jusqu’à son nom, certaines et certains, anonymes ou hommes publics, dans l'ombre ou dans la lumière, osaient s'élever contre l'occupant.
Ils étaient rares mais ces Françaises et ces Français ont alors su montrer que les valeurs de l'humanisme étaient enracinées dans l’âme du pays. Partout, et au péril de leur vie, ils défendaient, accueillaient, cachaient, sauvaient des enfants, des femmes, des hommes, persécutés pour le seul fait d’être né Juif.

En Eure-et-Loir, les 7 Justes que nous honorons aujourd’hui ont risqué leurs vies pour sauver les membres de la famille RINGART OISTRACH.
(…) Les protecteurs de Mme DITTMAN ont choisi la voie du courage et de l’honneur, mais surtout celle du coeur. Avec beaucoup d’autres, anonymes, discrets, ils ont ouverts leurs portes à des Juifs pourchassés, mais d’abord à leurs yeux, à des voisins, à des amis d’amis, à des relations de travail et, la plupart du temps, à des inconnus.
Dans le visage des Juifs persécutés, ils n’ont vu rien d’autre que la souffrance de leurs frères humains. Alors, humblement, modestement, ils ont rempli leur devoir d’humanité, comme une évidence.

La qualification de « Justes parmi les Nations », chacune et chacun des hommes et des femmes que nous honorons aujourd’hui l’a pleinement mérité. Aimé, Roger et Thérèse BRETON, Albert et Marguerite MOREAU, et René et Geneviève GASTELAIS n’auront pas connu l’honneur d’être distingués de leur vivant.
Alors, fils, filles et parents de ces sept Justes, soyez fiers de leur action.

A ceux qui voulaient nier l’Homme, ces sept héros, avec tous les Justes parmi les Nations, ont apporté la plus magnifique des réponses.
Dans ce martyr que vivaient les Juifs, victimes de la monstrueuse coalition de la haine et de l’indifférence, ils ont montré que la France, leur France, à laquelle ces Juifs ont cru si intensément, n'avait pas tout à fait disparu.
Par leurs actes d’hommes et de femmes libres, ils ont bravé un ennemi dont la victoire était justement de forcer l’Homme à l’obéissance aveugle et à l’oubli de son prochain. Ils ont été les symboles de l’humanité et de la fraternité."

Le public put ensuite visiter une exposition particulièrement bien documentée. Elaborée par les enfants de l'école élémentaire, sous la direction d'Emmanuel Chevron, celle-ci était consacrée aux Justes et décrivait le parcours d'Anna, enfant cachée.

NB : Nos remerciements au Délégué du Comité Français pour Yad Vashem, Pierre Osowiechi qui a rassemblé les éléments constituant cette page. Précisons qu'il répond en outre à l'invitation du directeur et des enfants de l'école élémentaire d'Abondant pour y prolonger le travail de mémoire ayant imprégné cette cérémonie.

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lundi 21 juin 2010

P. 243. Cérémonie à Chelles

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Cliquer sur l'invitation afin de l'agrandir (DR).

22 juin 2010 à 18h30
Mairie de Chelles :
hommage aux Justes
Henri-Joseph et Marie Degrémont

Synthèse :

- "Natif de Pologne, Joseph Goldsztajn arrive à Paris en 1936. Il exerce son métier de boucher rue Bisson, dans le 20e arrondissement. Sa femme Liba, et leur fils Henri, né en 1931, étaient d’abord restés à Serock en Pologne. Ils viennent le rejoindre en 1938. La famille s'agrandît d'une petite Hélène, née à Paris en 1940.
Joseph s'installe à son compte, au 46, rue Julien Lacroix, dans le 20e arrondissement, et la famille habite dans l'immeuble attenant à la boucherie.

A la déclaration de la guerre, Joseph Goldsztajn souscrit un engagement volontaire dans le groupement des engagés volontaires étrangers de l'armée française. Il y rejoint de nombreux juifs vivant en France et de 52 nationalités différentes…
Joseph est incorporé au camp d'instruction de Septfonds le 10 mai 1940 et sera démobilisé à Caussade le 31 août 1940.
Il est ensuite envoyé dans un camp de travail à Marseille dont il sera libéré sur présentation d'un certificat de travail fourni par des amis.

Quelques jours avant la rafle du Vel d'hiv, en juillet 1942, Joseph Goldsztajn est prévenu de l’imminence d’un grave danger. Il part se réfugier à Villepinte chez un ami. A l’époque, on suppose encore que seuls les hommes sont ciblés plutôt que les femmes et les enfants.
Liba et ses deux enfants restent donc à leur domicilie. Survient la rafle. La police française arrête toutes les familles juives de l'immeuble. Liba ne répond pas aux coups donnés sur la porte par la police. La mère et les deux enfants eurent ainsi la vie sauve.

Joseph et Liba décident alors de trouver une famille d'accueil pour leurs deux enfants âgés de 11 ans et 2 ans. Ils les amènent à Villepinte, chez Mr et Mme Bruno, une famille catholique. Hélène sera baptisée et vivra chez les Bruno jusqu'à la Libération. Henri n'y restera que quelques semaines.
Munis de faux papiers, Joseph et Liba viennent en effet chercher Henri et s'enfuient avec lui en zone sud.

Ils trouvent refuge à Pierre-en-Bresse, en Saône-et-Loire, et vont y rester plus d’un an. Hélas, les rafles se multiplient aussi en zone sud. Les Goldsztajn décident de remonter vers Paris. Ils entendent alors parler des Coudreaux, un quartier de Chelles, à 20 kilomètres de la capitale. Plusieurs familles juives y seraient cachées. Ils s'y rendent.

Henri-Joseph et Marie Degrémont, acceptent effectivement de leur offrir l’asile. Henri-Joseph Degrémont, était professeur de gymnastique à la retraite. Le couple n'avait pas d'enfants. Tous deux avaient déjà porté de l’aide à d’autres persécutés raciaux.
Selon un code employé par Henri-Joseph et Marie Degrémont, ceux-ci feignaient appeler leur chien mais prévenaient en réalité les réfugiés cachés dans le grenier de leur maison. Ces derniers savaient s'ils pouvaient sortir de leur cachette, s'ils devaient se tenir coit ou au contraire, s'ils devaient courir "se planquer" dans le bois voisin.

La famille Goldsztajn restera cachée par les Degrémont jusqu'à la Libération. Puis les liens entre les deux familles ont perduré au point qu’Henri-Joseph et Marie garderont la petite Hélène pendant un an.
Hélène continue à les nommer "Tonton" et "Tata" lorsqu'elle évoque ces moments heureux partagés avec eux.
Partie vivre ensuite en Argentine, elle revint pour un voyage en France en 1963. Sa « Tata », veuve entretemps, s’était remariée. Hélène voulut lui présenter sa première fille, Karina. Et se souviendra toujours Hélène, c’est devant Marie que la petite Karina effectua ses premiers pas… Quel plus pur symbole d’une victoire sur la Shoah d’une Juste et de la fille d’une enfant cachée ?"

Eté 1945,
de g. à dr. : Liba Goldsztajn, son époux Joseph et Marie Degrémont,
à l'avant-plan : Hélène.
(Arch. fam H. Goldsztajn/BCFYV/DR).

Cette cérémonie du 22 juin sera relatée sur une page ultérieure de ce blog. Hélène sera revenue d'Argentine pour cette remise de la Médaille et du Diplôme de Justes à Jacques Langlois, ayant droit des époux Degrémont.

Le Comité Français pour Yad Vashem souligne aussi le passé héroïque de la commune de Chelles :

- en 1940, le Député Maire de cette petite ville de Seine et Marne s’était opposé aux pleins pouvoirs votés au Maréchal Pétain,

- Chelles devint un important centre de Résistance à partir duquel furent réalisés de nombreux sabotages et attaques,

- en août 1944, pendant les combats de la Libération, un grand nombre d’otages civils furent assassinés devant la Mairie,

- parmi les « fusillés de la Cascade du Bois de Boulogne » plus de la moitié des trente-cinq victimes étaient originaires de Chelles,

- la Ville de Chelles est décorée de la Croix de Guerre 1939 /1945.


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